Dimanche, Jane Birkin est morte. On imagine volontiers les nécrologues de France et d’outre-Manche remiser à la hâte la Piz Buin et les serviettes de plage pour finaliser leurs hommages, rédigés de longue date, mais nécessitant la pose d’une dernière couche.
On rappellera, dans la grande presse comme dans celle de boulevard, qu’elle était indissociable de Serge Gainsbourg, sa muse éternelle, et qu’elle était la mère de Charlotte dont elle partageait la délicatesse et la fragilité. Les gazettes rappelleront aussi qu’elle a brillé de l’insolence de sa jeunesse dans «La piscine», une pellicule saisissant pour l’éternité la jeunesse oubliée de Romy Schneider et le charme juvénile de l’Alain Delon, depuis devenu éternel.
D’autres nécrologues avisés ne manqueront sans doute pas de souligner qu’elle était l’évanescence même, notre insaisissable Jane. Ainsi, personne ne savait si son accent britannique était savamment entretenu, comme une forme de camouflage défensif, malgré des décennies passées en France, ou s’il était la marque véritable d’un déracinement impossible.
Au fil des ans, Jane est devenue Birkin comme Gainsbourg est devenu Gainsbarre, une abstraction, une icône, un monument, une légende.
«Paris est un leurre»
De légendes (d’un tout autre genre), il est également question dans un ouvrage intitulé «Paris est un leurre» (Editions Inculte, 2012) rédigé sous la plume habile de Xavier Boissel. Il narre l’histoire vraie – mais parfaitement invraisemblable – du projet qu’avait le gouvernement français de construire, à la fin de la première guerre mondiale, un double de la Ville Lumière.
Cette fausse ville se donnait comme ambition de piéger les pilotes allemands qui auraient eu comme ambition de pilonner Paris, à une époque où le vol, essentiellement de nuit, se faisait à vue, sans l’aide d’un radar. Des zones, proches de Paris mais dans des campagnes peu peuplées, ont ainsi été identifiées pour servir de réceptacle à cette ville fantôme.
Ce projet extraordinaire avait recours aux plus extravagants subterfuges: des toiles illuminées et de la vapeur pour simuler des usines, des chariots roulants et des lampes tempêtes pour singer des convois ferroviaires et des rangées interminables de petites lumières pour figurer des gares.
A l’époque des fake news et de la numérisation de la désinformation, ce projet, largement avorté puisque seule une infime partie vit le jour, rappelle toutefois, non sans malice, que, dans les guerres d’aujourd’hui comme d’hier, la ruse et le leurre demeurent des atouts particuliers.