S’il fallait un symbole pour imager le trafic autoroutier entre Lausanne et Genève, il en est un qui s’impose: un escargot avec un frein. On ne roule plus, on se traîne. Rien d’étonnant toutefois. Ce tronçon, le premier construit en Suisse, a été inauguré le 20 décembre 1963 et devait permettre aux visiteurs de l’Exposition nationale 1964 d’arriver rapidement à bon port. Les ingénieurs avaient compté large, mais ils ne pouvaient prévoir que la population suisse passerait de 5,8 à 9 millions au cours de ces soixante dernières années.
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Apocalypse au ralenti
On peine à comprendre pourquoi nos infrastructures de transport n’ont pas été adaptées à cette explosion démographique, mais le résultat est là: nous vivons l’Apocalypse au ralenti. Sur l’ensemble de notre pays, pas moins de 40'000 heures ont été perdues dans les bouchons en 2022. Bien évidemment, la situation ne pas en s’arrangeant.
Les difficultés ont atteint une telle gravité qu’une solution semble enfin se dégager. Les chambres ont donné leur feu vert à une politique d’investissements massive pour réduire les goulets d’étranglement. Cette décision est attaquée en référendum par les adeptes de la mobilité douce, nous nous prononcerons en novembre prochain.
Payer pour glander
Les infrastructures étant sollicitées bien au-delà de leurs capacités, se pose la question de l’entretien. Dans la mesure où les itinéraires alternatifs sont, eux aussi, surchargés, il faut réduire les pistes à disposition à chaque fois qu’une réhabilitation est nécessaire, c’est-à-dire en permanence. Les travaux un peu partout ajoutent au problème initial, abaissant la vitesse moyenne déjà bien éloignée des 120 km/h autorisés. Les beaux esprits verront dans cette lenteur l’arme ultime pour échapper aux radars, mais la consolation est bien maigre compte tenu du prix de la vignette. Aujourd’hui, on paie pour glander en attendant que la chaussée se dégage. Peut-être faudra-t-il intégrer un test de patience aux examens visant à l’obtention du permis de conduire.
Aucune marge de manœuvre
Nos infrastructures étant toutes en situation de surexploitation, la situation prend très rapidement des proportions dantesques dès qu’un problème de pose. Un accident peut être résorbé relativement rapidement, mais la météo peut aussi jouer les trouble-fêtes. Vendredi dernier, les intempéries ont emporté un tronçon d’autoroute dans les Grisons, contrariant très sérieusement le trafic routier Nord-Sud. Dans la mesure où Simplon et Gothard ont déjà dépassé leurs capacités, on voit mal comment ils pourraient absorber le trafic habituel du San-Bernardino. Nous devons solliciter nos voisins autrichiens à l’effet de pouvoir délester une partie de notre trafic sur le tunnel du Brenner.
L’urgence commande
Il faudra bien sûr plusieurs années pour que les investissements prévus déploient leurs effets. Chaque jour qui passe augmente les difficultés que nous rencontrons, de même que les coûts engendrés. Aux heures perdues dans les bouchons, il faut ajouter la maintenance des infrastructures, opération toujours plus périlleuse dans la mesure où une interruption de trafic n’est que très rarement possible. Il est donc très important de commencer les travaux au plus vite. Au vu des attentes de la population, un résultat positif en novembre est espéré. En attendant, faites tout de même attention si vous lisez cette chronique en attendant que l’autoroute se dégage, le portable au volant demeure interdit.