Commentaire d'Ellen De Meester
800 chasseurs partent tuer le loup et on retourne au Moyen Âge

Le Conseil fédéral a mis en vigueur l'ordonnance sur la régulation du loup à partir du 1er décembre, autorisant le tir préventif du loup jusqu'en janvier 2024. Une décision qui prend des proportions moyenâgeuses, selon notre journaliste Ellen De Meester.
Publié: 23.11.2023 à 18:00 heures
Pour cette année, les tirs de régulation ne seront autorisés qu’entre le 1er décembre et le 31 janvier 2024.
Photo: shutterstock
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Ellen De MeesterJournaliste Blick

Pas la peine de tendre l’oreille après le 1er décembre: vous n’entendrez pas le loup hurler. S’il est aussi malin qu’on le dit, il se fera discret et se retiendra de chanter. Sinon, c’est juste qu’il ne pourra plus le faire. Alors que le Conseil fédéral souhaite rapidement ramener la population du prédateur «à un niveau maîtrisable», une armée de chasseurs vient d’être recrutée pour décimer 7 des 13 meutes présentes sur le territoire valaisan.

Quelles émotions ont bien pu traverser ces 800 volontaires, au moment de demander l’autorisation de tirer le canidé? L’envie de tuer un lapin ou un cerf semble déjà bien incompréhensible, mais puisqu’on ne sert pas de selle de loup avec les spätzli, les motivations se résument-elles à la fierté de ramener la tête du monstre vaincu? Ou à l’envie de servir sa patrie en partant au combat? Difficile de croire que chacun de ces chasseurs ait des moutons à venger.

34 loups en deux mois

L’idée frôle une scène absurde de «La Belle et la Bête», dans laquelle le village tout entier, armé de torches, se rue sur le château du monstre. Ils ont peur, alors ils attaquent. Sauf que ce scénario fictif se déroule au Moyen Âge. Nous aussi, on y retourne, des fusils, des bombes et des lois anachroniques à la place des fourches. 

D’ailleurs, les propos du conseiller d’État valaisan Frédéric Favre, recueillis par le «Temps», n’auraient pas détonné dans un roman médiéval: «Nous n’allons pas faire de grandes battues pour prélever des loups. Il est exclu d’envoyer tous les chasseurs dans les montagnes, à la traque au canidé. Il n’y a pas de volonté de carnage.» Mais alors quelle est la volonté? Peindre des aquarelles depuis les buissons, pendant que le loup prend la pose? 

On parle d’un abattoir en plein air. Sans oublier que les volontaires devront se dépêcher: pour 2023, les tirs de régulation ne seront autorisés qu’entre le 1er décembre et le 31 janvier. Face à une si mince fenêtre, le sentiment d’urgence ne peut être qu’intense. Tellement intense qu’un éleveur de moutons du val d’Illiez, contacté par «20 Minutes», soupçonne un chasseur d’avoir tiré sur son chien, Léon, désormais grièvement blessé. Le seul crime de ce fidèle gardien? Ressembler au grand méchant loup, qu’on a juré d’anéantir au plus vite. Gardez vos chiens à l’intérieur: l’homme part en chasse. Et il est pressé. 

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