Un petit film d'animation suscite une grande indignation. Le Secrétariat d'État aux migrations (SEM) incite les demandeurs d'asile jugés comme indésirables à rentrer dans leur pays dans une vidéo explicative de quatre minutes. Parmi les destinataires figurent également les réfugiés ukrainiens.
Dans le petit film, on peut voir un homme à la peau foncée. Dans la version ukrainienne, il s'appelle Bohan Petrenko. Comme il n'a «de toute façon que peu de chances d'obtenir l'asile en Suisse», on lui conseille de rentrer directement chez lui. Et on lui explique courtoisement qu'il a droit à une aide financière en cas de retour volontaire dans son pays d'origine, s'il est originaire d'un État soumis à l'obligation de visa. Si sa terre d'origine ne fait pas partie de l'espace Schengen, il a même droit au financement... d'un projet d'entreprise. Rien que cela.
Vidéo traduite en ukrainien
La vidéo est disponible en plusieurs langues. Voici la version en français, publiée en 2020 déjà.
En mars, le SEM met en ligne la version ukrainienne sur son canal Youtube officiel. Réaction: irrités, les réfugiés slaves s'adressent à l'avocate ukrainienne résidant en Suisse Elina Iakovleva. Celle-ci a de ce pas pris position au nom de sa communauté, soulignant les incohérences de la vidéo.
La femme de loi bondit: si cette animation s'adressait avant tout aux Ukrainiens, il aurait peut-être déjà fallu un personnage à la peau blanche. Mais surtout: les Ukrainiens reçoivent un statut de protection temporaire, ledit permis S, et non pas un asile! Enfin, les Ukrainiens n'ont même pas besoin de visa pour entrer en Suisse...
«Le message du SEM est cynique et cruel»
Dans tous les cas, comment peut-on suggérer à des femmes et des enfants de retourner dans un pays où les bombes tombent et où les viols sont monnaie courante? «Le message de la vidéo est cynique et cruel», tonne Elina Iakovleva.
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Dans une interview accordée à Blick à l'occasion de la prochaine conférence sur l'Ukraine à Lugano, l'ambassadeur de l'Ukraine en Suisse Artem Rybchenko est clair, lui aussi: «Nos gens doivent juste s'éloigner de la guerre pendant un certain temps. Ils veulent rentrer rapidement chez eux. C'est important de le savoir. C'est une situation très différente de celle de nombreux autres réfugiés en Suisse.» Il a vu de ses propres yeux que de nombreuses femmes ukrainiennes étaient entre-temps déjà rentrées chez elles, «les familles voulant être réunies le plus vite possible».
Un dérapage embarrassant
Blick a confronté le SEM à ce qui semble être un dérapage très gênant. On y qualifie effectivement la publication de la vidéo d'incident. «Nous retirons la vidéo du web parce qu'elle prête effectivement à confusion», promet le porte-parole Daniel Bach.
Certes, il est indiqué dès le début qu'il s'agit d'une vidéo à destination des demandeurs d'asile. «Néanmoins, nous veillons à ce que les Ukrainiens soient informés correctement et surtout clairement sur ce sujet», poursuit Daniel Bach.
Et d'ajouter: «Il y a des personnes isolées qui ont fui l'Ukraine pour la Suisse, qui ont demandé ici le statut S, mais qui veulent déjà retourner dans leur pays. Si elles ne peuvent pas organiser et financer elles-mêmes ce retour, elles peuvent s'adresser au service-conseil du retour (CVR) du canton, et celui-ci peut les aider à organiser leur voyage. Dans certains cas, elles peuvent demander au SEM une aide financière pour les frais de voyage.»