Les traînées de condensation des avions ont refait leur apparition dans le ciel. Il y a quelques mois à peine, elles étaient bien plus rares et faisaient office d’exceptions. Avec le retour du trafic aérien, la guerre des prix sur les vols a repris de plus belle (comme si la pandémie n’était déjà qu’un lointain souvenir et que le vote sur la loi sur le CO2 n’avait jamais eu lieu). Même les prix des jets privés connaissent un dumping inédit par rapport à l’époque pré-Covid.
En termes de chiffres, le prix du vol Bâle-Dublin de Ryanair est imbattable: un aller-retour ne vous coûtera que 18 francs.
Si vous préférez l'Italie à l'Irlande, il faudra débourser un peu plus (mais la somme reste raisonnable). Pour 47,26 francs vous pourrez vous payer un vol aller-retour pour vous rendre à Palerme en Sicile avec EasyJet, toujours au départ de Bâle.
Des prix cassés qui ne couvrent pas les coûts
Ces prix ne convainquent pas le professeur Andreas Wittmer de l’Université de Saint-Gall: «Des prix aussi bas ne permettent pas de couvrir les coûts. Heureusement très peu de places sont proposées à de tels tarifs.» Pour l’expert en aviation, une chose est claire: «Ce ne sont que des techniques publicitaires pour encourager les réservations.»
Ryanair n’est pas la seule compagnie à offrir des prix bas. Depuis Zurich, vous pouvez vous envoler vers Madrid pour 60 francs avec Iberia. Depuis Genève, c’est Swiss qui propose un vol pour 69 francs vers Brindisi, dans le sud de l’Italie. Pour bénéficier de ces prix cassés, il faut toutefois voyager léger: seul le transport d’un bagage à main est autorisé.
Bien qu’avantageux, les prix de Swiss et d’Iberia ne sont pas aussi bas que les prix des compagnies low-cost. Chez Swiss, chaque billet d’avion doit couvrir les coûts fixes, et la compagnie ne souhaite pas participer à une guerre des prix ruineuse. «Nous partons du principe que les prix augmenteront à nouveau à moyen terme, en fonction de la rapidité du retour de la demande» explique la compagnie.
Les prix comme armes publicitaires
Si la demande était redevenue la même que celle avant la pandémie, il n’y aurait pas besoin de casser autant les prix. Mais face à des tarifs (aussi) bas, de nombreuses personnes sont sceptiques et attendent encore un peu avant de se jeter sur les réservations. Le professeur Andreas Wittmer explique que: «les prix cassés ont un objectif précis: faire rentrer dans l’esprit des gens que 'prendre l’avion n’est pas cher'».
Plusieurs pays ont déclaré la guerre à ce dumping des prix. L’Allemagne envisage d’instaurer un prix minimum de 50 euros par billet d’avion et l’Autriche a fixé la limite inférieure à 40 euros pour empêcher la faillite de la compagnie Austrian Airlines.
Des prix «décadents»
«Un prix minimum instauré à l’échelle européenne permettrait d’appliquer les mêmes seuils de prix dans tous les pays européens», explique le professeur de l’Université de Saint-Gall.
«Ces prix bas, c’est incroyablement décadent», déclare également Aline Trede, cheffe de file des Verts. «En tout cas, il aurait fallu imposer des conditions, comme l’Allemagne, la France ou l’Autriche. Des vols pour quelques francs, ce n’est pas du tout durable», ajoute la conseillère nationale bernoise. Sa solution: «Nous devons rouvrir la discussion sur la taxe sur les billets d’avion».