La peur est souvent paralysante. Face à des symptômes qui pourraient être révélateurs d'un problème, il arrive fréquemment qu'on choisisse de regarder ailleurs au lieu de tirer courageusement la chose au clair. Autant dire que lorsque ce phénomène s'inscrit dans une sphère aussi intime que notre urine ou nos selles, la question est encore un peu plus délicate. Faut-il s'inquiéter de la présence de sang dans nos déjections? Blick fait le point avec un urologue, afin que vous ne vous souciiez pas du problème lorsqu'il est trop tard.
Sang dans l'urine
À quel point dois-je m'inquiéter?
André Reitz, urologue à la clinique Hirslanden de Zurich, écrit dans son livre «Kompass Männergesundheit» (qu'on peut traduire par «Boussole de la santé masculine») que lorsque des hommes lui racontent en consultation que les toilettes étaient pleines de sang après avoir uriné, l'effroi se lit sur leur visage.
Il explique ensuite aux hommes que tout n'était probablement pas du sang. «La plupart du temps, la part de sang est surestimée, en raison de la propriété très colorante de l'hémoglobine». Selon lui, une coloration rouge de l'urine est malgré tout un événement à prendre au sérieux, qui devrait dans tous les cas faire l'objet d'un examen médical.
Quelles peuvent en être les raisons?
Selon André Reitz, la cause la plus fréquente d'une urine sanguinolente est une inflammation des voies urinaires. Les inflammations des reins et de la prostate ou les calculs rénaux peuvent également entraîner des urines sanguinolentes. Si l'urine est de couleur rouge, sans douleur, fièvre ou autres symptômes, il faut se faire examiner le plus rapidement possible par un urologue. Dans ce cas, la coloration de l'urine pourrait être le signe que la personne souffre d'un cancer de la vessie.
Quels examens permettent de clarifier la situation?
Tout d'abord, on examine si l'urine contient des globules rouges et blancs, ainsi que de la nitrite, du sucre ou des protéines qui sont des paramètres d'infection. Leurs valeurs peuvent valider cette hypothèse. Les reins, les voies urinaires supérieures, la vessie et la prostate sont ensuite inspectés à l'aide d'un appareil à ultrasons.
Si cela ne permet pas de clarifier l'origine du sang dans l'urine, d'autres mesures sont nécessaires, comme une cystoscopie. Selon les résultats, l'urine est ensuite examinée au microscope pour détecter la présence de cellules cancéreuses.
Qui est particulièrement à risque?
Le tabagisme est considéré comme le principal facteur de risque du cancer de la vessie, mais le contact avec des produits chimiques dans le cadre professionnel peut également en être à l'origine, comme nous l'explique André Reitz.
Les peintres, les vernisseurs et les personnes qui travaillent dans les entreprises de métallurgie ou de chimie et sont exposés pendant une longue période à des produits chimiques contenant certains hydrocarbures, se voient particulièrement menacés. Les coiffeurs qui manipulent des teintures pour cheveux et des produits chimiques sont aussi plus en danger.
Du sang dans les selles
À quel point dois-je m'inquiéter?
La présence de sang dans les selles peut être le signe de soucis bénins, mais aussi de maladies à prendre au sérieux. Selon André Reitz, toute personne qui peut le voir à l'œil nu dans la cuvette des toilettes doit immédiatement consulter un gastro-entérologue ou un proctologue. Plusieurs enquêtes ont démontré que les femmes laissent passer en moyenne quatre jours dans un tel cas, tandis que les hommes attendent en moyenne dix jours pour consulter.
Ces deux délais sont suffisants, dit André Reitz. Mais de nombreux hommes refoulent le problème pendant des mois, voire des années, et il est alors souvent trop tard pour guérir. C'est particulièrement vrai pour le cancer de la prostate. «Je suis régulièrement consulté par des hommes au début de la soixantaine dont le père est décédé d'un cancer, qui n'ont jamais fait d'examen préalable et qui souffrent maintenant, eux aussi, d'un carcinome.»
Qu'est-ce que ce signe pourrait révéler?
Dans le meilleur des cas, la présence d'hémorroïdes ou de lésions du rectum. Dans le pire des cas, d'un cancer de l'intestin. Chez les hommes, ce type de cancer est le plus fréquent, après le cancer de la prostate et le cancer du poumon. Une tumeur sur huit les concerne.
Quels examens permettent de clarifier la situation?
La coloscopie est le seul examen fiable qui permet de détecter les tumeurs dans l'intestin, et ce, à un stade auquel elles ne sont pas encore malignes. Toutefois, il faut envisager un dépistage si du sang apparaît dans les selles. Ceux dont des ancêtres directs ont eu un cancer de l'intestin devraient passer une coloscopie à partir de 40 ans, les autres à partir de 50.
Il existe également des dépistages qui consistent à analyser un échantillon de selles à la recherche de sang invisible à l'œil nu. Ils sont destinés aux personnes qui ne souhaitent pas se soumettre à une coloscopie et présentent le gros inconvénient de ne pas identifier avec suffisamment de certitude les tumeurs à un stade précoce.
Qui est particulièrement à risque?
Les personnes à risque sont celles qui ont une alimentation malsaine ou qui ont une alimentation telle que les selles passent beaucoup de temps dans l'intestin avant d'être éliminées. La consommation d'alcool, l'obésité, les prédispositions héréditaires et les maladies inflammatoires de l'intestin sont d'autres facteurs de risque.