Cette histoire sonne comme une blague, mais elle est totalement sérieuse. Elle a d'ailleurs fait l'objet d'un article dans la BBC. Beaucoup d'indices montrent que c'est la Chine elle-même qui a inventé l'existence d'un chercheur suisse, «Wilson Edwards».
Le but: contrer les thèses circulant beaucoup sur internet qui mettent en cause le laboratoire de Wuhan dans l'émergence de la pandémie de Covid-19. Jusqu'ici, la thèse scientifique dominante est que le virus est apparu dans un marché de la métropole de 11 millions d'habitants.
Wilson Edwards, donc, est censé être un chercheur en biologie à l'Université de Berne qui se serait exprimé sur Facebook. En tant que biologiste, il est consterné par la politisation de la recherche de l'origine du coronavirus au cours des derniers mois. «Les États-Unis, en particulier, soupçonnent depuis longtemps la Chine d'être responsable de la pandémie mondiale», a-t-«il» écrit sur Facebook.
«Prenez contact avec nous»
Le (faux) chercheur ne veut rien savoir de la thèse selon laquelle le laboratoire de Wuhan serait responsable du déclenchement de la pandémie. «Des collègues chercheurs se sont plaints d'avoir été soumis à d'énormes pressions, voire à des intimidations de la part des États-Unis et de certains médias», explique-t-il.
Seulement voilà; il n'y a pas de chercheur du nom de Wilson Edwards. L'ambassade de Suisse à Pékin s'en est aperçue et a décidé de le faire savoir tant sur Twitter que sur le pendant chinois de l'application, Weibo. «Wilson Edwards, si vous existez vraiment, prenez contact avec nous», appelle l'ambassade dans son message.
Le ton ironique n'est pas anodin: tout laisse à penser qu'il s'agit d'un «fake profil» sur Facebook. Il n'y a pas de Suisse enregistré sous ce nom, et encore moins de travaux scientifiques en cours. Le profil Facebook a été supprimé depuis le début de la controverse.
Mais avant cela, les médias d'État chinois avaient déjà repris le post de Wilson Edwards, saluant les travaux du prétendu scientifique suisse. Le discours du Bernois allait parfaitement dans le sens de ce que martèle la Chine depuis plusieurs mois: l'accusation selon laquelle le virus se serait échappé du laboratoire P4 de Wuhan est un pur dénigrement de la part des États-Unis. Il n'y a pas de preuve scientifique.
Plus de 17'000 comptes Twitter supprimés
Les autorités chinoises semblent particulièrement tendues. Sitôt que l'ambassade de Suisse a demandé aux médias chinois de publier un rectificatif, de nombreux messages ont soudainement été introuvables. Wilson Edwards a disparu aussi vite qu'il est apparu.
L'épisode ne semble pas être un cas isolé. Déjà à la fin de l'année dernière, Twitter avait supprimé plus de 170'000 comptes. Ceux-ci avaient diffusé la propagande au sujet du Covid et de fausses informations dans l'intérêt des dirigeants chinois.