Neuchâtel, canton laïc
La photo officielle du Conseil d'État avec le Christ dérange

Pour sa photo officielle 2023-2024, le gouvernement neuchâtelois, présidé par le libéral-radical Alain Ribaux, pose avec «Le Christ de fraternité», sur les hauts de La Chaux-de-Fonds. Dans un canton laïc et multiculturel, ce choix fait débat.
Publié: 02.06.2023 à 16:50 heures
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Dernière mise à jour: 02.06.2023 à 16:53 heures
«En posant avec cette œuvre d’art, le Conseil d’État n’entend aucunement faire – et ne fait pas – la promotion d'une religion en particulier. Il exprime un message d’ouverture, et de laïcité», écrit le service de communication de l'Etat de Neuchâtel.
Photo: DR
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Amit JuillardJournaliste Blick

«Le Christ de fraternité» est source de division. Sur Facebook, un commentaire fuse. «N'y a-t-il pas un lieu plus universel (...)? Ne sommes-nous pas un canton laïc?», questionne la députée vert'libérale neuchâteloise Brigitte Leitenberg.

La candidate pour le Conseil national et le Conseil des États s'étonne du choix du gouvernement cantonal pour sa photo officielle 2023/2024, diffusée le 1er juin. Présidé pour les douze prochains mois par le libéral-radical Alain Ribaux, le Conseil d'État pose devant une immense sculpture métallique — trois tonnes, dix mètres de haut, plus de deux de large — de l'artiste local Francis Berthoud.

«Un peu trop chrétien»

Sise sur les hauts de La Chaux-de-Fonds, l'œuvre représente Jésus, sur la croix. Son corps est formé de multiples mains tournées vers le ciel. «Je n'aurais jamais choisi ce décor, parce qu'il n'inclut pas tout le monde et la statue peut être terrifiante pour certaines personnes, développe Brigitte Leitenberg, jointe par Blick. C'est un peu trop chrétien pour un canton laïc qui fait beaucoup pour intégrer toutes les confessions religieuses et les origines.»

«Je n'aurais jamais choisi ce décor, parce qu'il n'inclut pas tout le monde», argumente Brigitte Leitenberg.
Photo: KEYSTONE/Jean-Christophe Bott

Pour elle, le monumental Pégase, du même auteur, planté juste à côté, aurait fait l'affaire. «Je suis croyante, mais pas chrétienne, poursuit la commerçante, également conseillère générale dans la métropole horlogère. Je suis juive, mais ce n'est pas pour ça que je prends la parole. La question est la même pour les personnes musulmanes, hindouistes, bouddhistes ou non croyantes. Ce que je défends, c'est le multiculturalisme», insiste la présidente de la section montagnarde de son parti.

Au fil de la conversation, Brigitte Leitenberg appuie plusieurs fois sur un point. «Je félicite le Conseil d'État et les belles personnes qui le composent pour son travail en matière de cohésion sociale. Cette image n'enlève rien à leurs compétences. Mais on aurait pu trouver une meilleure représentation des valeurs humanistes que ses membres défendent.»

«Message d'ouverture»

Contacté ce vendredi par Blick, l'Exécutif, qui compte trois PLR et deux socialistes, répond à la politicienne, via son service de communication. «Nous comprenons pleinement les interrogations de Madame Brigitte Leitenberg, qui sont légitimes, écrit-il. Aux yeux du Conseil d’État, il s’agit d’une œuvre d’art. Une œuvre d’art qui véhicule un message de solidarité et de fraternité. L’absence de croix renforce cette vision.»

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«La laïcité signifie avant tout la neutralité de l'État en matière de religion»
Le Conseil d'État neuchâtelois
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Quid de la laïcité, inscrite dans l'article premier de la Constitution cantonale? «Par cette photo, le Conseil d’État exprime l’idée que la laïcité signifie avant tout la neutralité de l'État en matière de religion. En posant avec cette œuvre d’art, le Conseil d’État n’entend aucunement faire — et ne fait pas — la promotion d'une religion en particulier. Il exprime un message d’ouverture, et de laïcité. La laïcité d’un État n’est pas un rejet des religions, mais justement une ouverture à toutes et tous.»

L'Exécutif réfute toute volonté de provoquer

Le gouvernement reconnaît toutefois «qu’un Christ est un symbole religieux. Mais au-delà de son appartenance à une religion, c’est surtout un formidable message de solidarité et de fraternité.» Des valeurs «universelles» et «importantes».

«Ce message d’ouverture respecte toutes les cultures et toutes les religions, y compris la religion chrétienne, insistent les autorités. Le Conseil d’État souhaite que chacune et chacun apporte sa pierre à l’édifice.» Ainsi, «le fait que l’œuvre soit constituée uniquement de mains tendues dans une direction représente bien le fait que, pour s’élever, il faut savoir travailler de concert et tendre vers un but commun. C’est la base même du vivre ensemble et de toute société démocratique, telle que notre République l’applique depuis maintenant 175 ans.»

Enfin, l'Exécutif réfute toute volonté de provoquer. «Le choix de poser avec cette œuvre d’art n'a pas d’autre but que d’affirmer la détermination du Conseil d’État dans la conduite des affaires de la République.» Ainsi soit-il!

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