Moins de temps et moins d'argent
Pourquoi les Suisses ne veulent plus construire leurs propres logements?

Pendant longtemps, les particuliers ont construit une grande partie des nouveaux bâtiments en Suisse. Entre-temps, leur part a nettement diminué, selon une étude de la banque Raiffeisen. Pourquoi ce déclin? Comment la situation va-t-elle évoluer? Blick vous dit tout.
Publié: 16.05.2024 à 10:54 heures
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Dernière mise à jour: 16.05.2024 à 13:17 heures
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Les particuliers construisent de moins en moins en Suisse.
Photo: IMAGO/MiS
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Martin Schmidt

Les particuliers ont-ils perdu l'envie de construire leur propre maison ou d'assurer leur retraite en construisant des logements locatifs? C'est la conclusion à laquelle on pourrait arriver en consultant la dernière étude de Raiffeisen sur le marché immobilier suisse.

La banque a analysé plus d'un million de demandes de permis de construire. Le résultat est surprenant: les particuliers se retirent de plus en plus en tant que maîtres d'ouvrage. En 2001, ils déposaient encore près de 40% des demandes de permis de construire. L'année dernière, ils n'étaient plus que 18%. 

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«La complexité des projets de construction a fortement augmenté»
Fredy Hasenmaile
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L'expert immobilier de Raiffeisen Fredy Hasenmaile y voit toute une série de raisons: «La complexité des projets de construction a fortement augmenté. Lorsque les particuliers se rendent compte de l'étendue des connaissances que suppose la construction et de la charge de travail que cela représente, ils perdent effectivement souvent l'envie.»

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Hausse record des loyers

Pendant longtemps, le retrait des particuliers est passé inaperçu, les professionnels s'étant engouffrés dans la brèche. Mais la hausse des taux d'intérêt a désormais également fait baisser les prix des fournisseurs institutionnels et des agences immobilières. Pourtant, la demande de logements serait élevée, notamment en raison de la forte immigration. Pour les locataires, la pénurie de logements a des conséquences directes. Ainsi, les loyers ont augmenté de 6,3% en un an dans toute la Suisse. Cela correspond à la plus forte croissance annuelle depuis que l'indice a été recensé pour la première fois en 1996.

Chez les maîtres d'ouvrage privés, le recul de l'activité de construction touche tous les segments de la construction de logements. Ils ne planifient plus qu'un logement locatif sur dix. Leur engagement dans la propriété par étage diminue également. De même, les maîtres d'ouvrage privés réalisent de moins en moins souvent leur rêve de maison individuelle en régie propre.

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Les particuliers construisent beaucoup moins de maisons individuelles

Les maisons individuelles sont mal vues en période de pénurie de terrains à bâtir et échouent souvent en raison du prix élevé du mètre carré. La concurrence pour les terrains à bâtir restants en Suisse est grande. Là où les rêves de maison prenaient forme autrefois, les maîtres d'ouvrage professionnels construisent de plus en plus de logements en propriété par étage et en location.

Ainsi, le nombre de maisons individuelles construites chaque année a diminué de moitié en dix ans, passant de 12'000 à plus de 6000 biens. Il arrive que les anciennes maisons doivent céder la place, ce qui explique que le nombre net de nouvelles maisons soit nettement inférieur. Ou alors, les professionnels construisent les maisons individuelles et les vendent ensuite aux particuliers.

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«Les immeubles d'habitation deviennent donc de plus en plus grands, ce qui rend également plus difficile la possibilité de financement pour les particuliers»
Fredy Hasenmaile
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Des conditions générales moins favorables pour les particuliers

Compte tenu du prix élevé des terrains et des coûts de construction, les particuliers peuvent de moins en moins financer un projet de construction. «L'une des raisons est le flot de réglementations que les maîtres d'ouvrage professionnels peuvent mieux gérer, notamment grâce aux effets de synergie. Pour les particuliers, les conditions générales se sont encore plus détériorées», explique Fredy Hasenmaile.

Outre les prescriptions croissantes en matière de construction, la densification souhaitée par les politiques a également un impact sur l'activité de construction privée. «Les immeubles d'habitation deviennent donc de plus en plus grands, ce qui rend également plus difficile la possibilité de financement pour les particuliers», poursuit-il. Le fait que les prix de l'immobilier en Suisse augmentent plus fortement que les revenus renforce encore cet effet. Les particuliers ne peuvent pas satisfaire aux exigences élevées en matière de viabilité financière et ne peuvent donc pas réaliser des projets rentables, ce qui laisse leurs terrains à bâtir en friche pendant longtemps.

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Un droit à la construction de logements?

En outre, les prestations propres diminuent. Alors qu'auparavant, les maîtres d'ouvrage privés mettaient souvent la main à la pâte – que ce soit en tant qu'architecte, chef de chantier, poseur de sols ou plâtrier – c'est de moins en moins le cas aujourd'hui. «Les compétences artisanales ont diminué dans une population où la part des emplois de bureau est en augmentation», explique l'expert de Raiffeisen. A cela s'ajoute un phénomène de prospérité. Les particuliers sont moins enclins à trimer sur leur propre chantier pendant leurs week-ends ou leurs jours de congé.

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«L'autre solution serait de réduire les réglementations. Construire devrait redevenir plus simple en réduisant les obstacles à la construction»
Fredy Hasenmaile
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La Raiffeisen identifie deux possibilités pour que l'activité de construction puisse à nouveau augmenter en Suisse. D'une part, il s'agirait d'augmenter les loyers, ce qui rendrait la construction à nouveau attrayante. Mais cela ne serait guère souhaitable d'un point de vue social. «L'autre solution serait de réduire les réglementations. Construire devrait redevenir plus simple en réduisant les obstacles à la construction», avance Fredy Hasenmaile. L'expert en immobilier milite pour une adaptation de la loi. «Le droit à la construction d'un nombre suffisant de logements pourrait être ancré dans la loi et ainsi faire contrepoids devant les tribunaux à des intérêts tels que la protection contre le bruit ou la protection des monuments.»

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