Malades du Covid au restaurant
Les autorités valaisannes n'avaient «pas de base légale» pour agir

Le Conseil d'Etat aurait appris, en octobre dernier, que «300 personnes testées positives» au coronavirus continuaient d'aller au restaurant. Faute de base légale, il n'est pas intervenu. Les autorités confirment mais tempèrent ce nombre.
Publié: 02.06.2021 à 15:56 heures
|
Dernière mise à jour: 16.06.2021 à 11:28 heures
Grâce à SocialPass, l'Etat valaisan a croisé les données des personnes qui ont fréquenté les restaurants avec les données officielles des malades du covid et des personnes placées en isolement. (Photo d'illustration)
Photo: Keystone
ANTOINE ZOOM (1).png
Antoine HürlimannResponsable du pôle News et Enquêtes

C'est une affaire qui paraît surréaliste. Les autorités valaisannes auraient découvert en octobre dernier que «300 personnes testées positives au Covid-19» continuaient d'aller au restaurant comme si de rien n'était, a appris Blick. Ces «300 personnes ont pu contaminer jusqu'à 1500 personnes», avancent des sources bien renseignées. Problème: aucune poursuite n'a été lancée pour faire cesser ces comportements irresponsables.

Pour comprendre cette situation ubuesque, il faut s'intéresser à la manière dont les autorités auraient découvert le pot aux roses. Elles auraient réalisé un test informatique, durant lequel la liste officielle des personnes contaminées était croisée avec les données rentrées sur l'application de traçage SocialPass, utilisée dans les bistrots.

Pour mémoire, le préposé fédéral à la protection des données pointait du doigt lundi «les exploitants qui ont accordé aux autorités sanitaires cantonales de Vaud et du Valais un accès direct à la base de données centralisée et l'ont mise à disposition pour un nombre quelconque d'options de recherches ciblées».

Pas de base légale

Nous avons contacté mercredi matin Esther Waeber-Kalbermatten, conseillère d'Etat en charge de la Santé au moment des faits, aujourd'hui à la retraite. Elle nous confirme l'existence de ce test informatique. Elle assure cependant «n'avoir jamais vu de liste» et n'avoir «jamais vu de chiffre concret»: «Nous n'avions aucune base légale pour exploiter ces informations, la loi sur la protection des données interdit ce genre de croisement de données. Nous ne voulons pas de ce type de contrôle en Suisse ou en Valais.»

En tant que cheffe du Département de la santé, n'a-t-elle pas eu l'impression que des vies auraient pu être sauvées si ces personnes testées positives, qui ne respectaient pas les mesures d'isolement, avaient été dénoncées? «Je pense qu'il faut faire faire attention et ne pas directement lier ces cas avec des morts, argumente-t-elle. J'ai dit à l'époque que nous ne voulions pas savoir qui étaient ces gens mais que nous allions renforcer les contrôles sur les personnes qui devraient être en quarantaine. C'est ce que nous avons fait.»

Pour plus de détails, elle nous renvoie vers Jean-Bernard Moix, directeur de Promotion santé Valais. Ce dernier corrobore les affirmations d'Esther Waeber-Kalbermatten. «Il n'y a jamais eu 300 personnes concernées», assène-t-il d'entrée. Il poursuit: «La réalité est la suivante. Après ce test informatique, dont le but était de voir s'il était possible techniquement de croiser un certain nombre de données, nous avons remarqué que plusieurs personnes testées positif au Covid-19, mais surtout des personnes qui auraient dû se trouver en quarantaine, avaient scanné un QR code dans un établissement public.»

«Cela a conscientisé les autorités»

L'homme indique que le premier document qu'il a eu sous les yeux comportait beaucoup d'imprécisions et de doublons. «Nous avons épuré la liste et nous avions au final une centaine de cas problématiques, dont une majorité de gens qui ne respectait pas les mesures de quarantaine.»

Jean-Bernard Moix assure par ailleurs qu'il ne s'agissait que d'un test et qu'il n'y a aucune volonté «de construire des procédures du genre». En outre, cet épisode n'aurait pas servi à rien: «On sait qu'il n'y a pas 100% de la population qui respecte les règles, c'est impossible. Mais cela a permis de conscientiser les autorités encore plus.»

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la