La roue tourne. Et elle est en train de favoriser la Suisse. Il ne s’agit que d’une coïncidence de calendrier, mais l’avis favorable formulé mardi 21 novembre par la Commission européenne sur l’état des futures négociations bilatérales avec la Confédération ressemble, à s’y méprendre, à un copié collé des déclarations d’Emmanuel Macron à Lausanne lors de sa visite d’État.
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Le président français avait, devant plus d’un millier d’étudiants de l’université et aux côtés d’Alain Berset, plaidé pour une accélération des pourparlers entre la Suisse et l’Union européenne d’ici la fin de l’année, en vue d’un accord si possible avant l’été 2024. Il avait aussi défendu ouvertement l’approche d’une «Europe à la carte» au sein de la Communauté politique européenne, fixant quatre objectifs de partenariat aux pays membres de ce forum informel, et non membre de l’Union: plus de coopération dans les domaines de la sécurité (défense), des migrations, des infrastructures énergétiques et de la transition écologique.
Allô, Bruxelles?
Message reçu à Bruxelles? Le ton du communiqué publié par la Commission européenne ressemble à une porte ouverte. «Suite à l’approbation de l’accord commun par le Conseil fédéral suisse, le Collège d’aujourd’hui a effectivement approuvé le texte. Nous avons pris note de la décision helvétique du 8 novembre de préparer d'ici à la fin de l’année un projet de mandat pour entamer une négociation sur un large paquet avec l’UE. Si tel est le cas, l’UE reflétera la décision de la Suisse et la Commission soumettra au Conseil une recommandation d’ouverture des négociations». En clair: feu vert à une reprise rapide des pourparlers en vue plusieurs futurs accords bilatéraux.
Pas de surprise
Que cette porte s’ouvre n’est pas une surprise. C’est le Conseil fédéral, rappelons-le, qui l’avait claqué au nez de Bruxelles en rejetant unilatéralement, le 26 mai 2021, le projet d’accord institutionnel supposé englober l’ensemble des relations entre la Suisse et son premier partenaire commercial. Reste que les mots ont leur importance. La confiance semble de retour. Les deux parties n’ont pas, contrairement à ce que voulait la Commission européenne, signé un document commun. Il faudra sans doute attendre pour cela le mandat de négociation. Mais leur paraphe mutuel paraît désormais probable.
Chercheurs suisses en attente
Plus intéressant, et véritable victoire helvétique: les tractations sur un retour des universités et chercheurs suisses dans les programmes de recherche communautaires – notamment «Horizon Europe» doté d’un budget de 95 milliards d’euros jusqu’en 2027 peuvent reprendre. «Alors que les négociations formelles sur l’accès futur de la Suisse aux programmes de l’UE ne peuvent commencer que dans le cadre d’un large paquet, une fois que les deux parties auront les mandats nécessaires pour négocier tous les éléments de ce paquet, la Commission est prête, dans l’intervalle, à s’engager avec la Suisse par le biais de discussions exploratoires spécifiques, notamment sur les programmes de l’Union» précise le communiqué bruxellois. Bingo! Les responsables de l’université et de l’École polytechnique fédérale de Lausanne avaient clairement fait savoir à Emmanuel Macron que leurs chercheurs rongent leurs freins. La reconnexion semble imminente.
Et maintenant?
Bientôt d’autres annonces? C’est probable. La Suisse s’est par exemple déjà engagé à accueillir sur son sol un prochain sommet de la Communauté politique européenne (CPE), sans doute en 2025. On peut imaginer que dans les domaines cités (défense, migration, énergie, transition écologique) Berne aura à cœur de saisir la perche tendue par Emmanuel Macron. Cela serait en tout cas habile. Car la porte bruxelloise, même rouverte, peut toujours se refermer.