«Je n’ai aucune compréhension pour les poutinistes qui prétendent que les Russes n’ont fait qu’anticiper une attaque de l’OTAN», assène Henryk M. Broder, un célèbre publiciste allemand, dans son ultime article pour la «Weltwoche». Il compte se distancier de l’hebdomadaire suisse, dans lequel il publie depuis 20 ans, car il désapprouve que la ligne éditoriale pro-Poutine du rédacteur en chef, Roger Köppel.
Dans son texte, il dénonce les discours, repris notamment dans la «Weltwoche», qui justifie l’invasion de l’Ukraine par les relations passées entre les deux pays. «Oui, il y a toujours un historique, généralement même plusieurs, qui entrent en concurrence, écrit Henryk M. Broder. C’est également le cas dans le cas du conflit entre la Russie et l’Ukraine. Mais ce qui est certain, c’est que c’est bien la Russie qui agresse actuellement l’Ukraine et non l’inverse.»
Henryk M. Broder dénonce également la place laissée dans les lignes de la «Weltwoche» à ceux qui comprennent Poutine et «veulent restaurer l’honneur perdu de la Russie».
Un rédacteur en chef «poutiniste»
Si le nom de Roger Köppel n’est pas mentionné en tant que tel, les reproches sont à peine déguisés dans l’éditorial de Henryk M. Broder. Le conseiller national UDC ne s’est pas fait que des amis depuis le début de la guerre en Ukraine. Sa compréhension envers les décisions de Vladimir Poutine fait polémique. «La raison de cette attaque réside, selon les dirigeants russes, dans la politique antirusse du gouvernement ukrainien, qui vise sans compromis à intégrer cet État limitrophe de la Russie dans l’UE et surtout dans l’alliance militaire avec les Américains. Les Russes n’acceptent pas cela. Leurs avertissements sont passés à la trappe», a-t-il écrit dans un édito mi-juin.
Pour détourner l’attention de ses propres erreurs, l’Occident mise sur «la diabolisation et les histoires à dormir debout». Comme celle selon laquelle Poutine serait au moins aussi mauvais que Hitler, Staline, Gengis Khan «ou les trois ensemble». Et les médias tenteraient d’apporter la preuve d’une cruauté guerrière profondément ancrée chez les Russes, une sorte de constante culturelle de la déshumanisation.
Turbulences pour Roger Köppel
Ce n’est pas la seule polémique qui touche Roger Köppel ces derniers temps. Jeudi, la commission des affaires juridiques du Conseil des États a annoncé qu’elle estime que le conseiller national ne devrait pas perdre son immunité parlementaire. L’élu UDC est soupçonné d’avoir rendu public sur la chaîne vidéo «Weltwoche Daily» des documents confidentiels issus de la commission de politique extérieure du National. Cette dernière a porté plainte.
À la fin mars, le Zurichois avait rapporté une perquisition de la filiale moscovite de l’horloger suisse Audemars Piguet. Des montres suisses de luxe auraient été confisquées par le Kremlin. Roger Köppel, membre de la commission de politique extérieure, se serait appuyé sur une note d’information confidentielle du DFAE. Il avait annoncé en avril renoncer volontairement à son immunité. Le conseiller national bénéficie de la présomption d’innocence.
Par 9 voix et 3 abstentions, la commission sénatoriale a refusé de lever l’immunité de l’élu UDC. Selon elle, ce cas concerne en premier lieu le respect des règles et pratiques internes au Parlement. Il n’est alors pas approprié que le Ministère public de la Confédération (MPC) s’occupe de cette affaire de violation présumée du principe de la confidentialité des délibérations des commissions.
La commission propose au Bureau du Conseil national d’envisager la possibilité de prononcer une sanction. Roger Köppel pourrait ainsi écoper d’un blâme ou être exclu six mois au plus des commissions dont il est membre. La commission de l’immunité du National devra à nouveau se prononcer.
(Adaptation par Jessica Chautems, avec ATS)