En temps normal, Viktor Hämmerli travaillerait d'arrache-pied. Le milieu de l'été est la période la plus chargée pour ce maraîcher du Seeland bernois qui plante chou-fleur, fenouil et laitue au printemps et les récolte autour de la mi-juillet.
Mais la grêle à tout détruit. Enfin, presque tout, mais il nourrit peu d'espoirs de pouvoir vendre les quelques légumes qui ont survécu au désastre. «Les consommateurs n'achèteront pas de chou-fleur avec des trous bruns», sait d'expérience le maraîcher.
Quand ce n'est pas la grêle, ce sont les fortes pluies des deux derniers mois qui ont fortement abîmé sa récolte. Les averses incessantes ont emporté la couche supérieure du sol et exposé ses pommes de terres à la lumière du jour, les rendant immangeables.
La récolte d'été a donc été anéanti par la pluie, et celle d'automne, qu'il a semée en avril, par la grêle. Car les fanes de la plante ont été déchiquetées par les grêlons, ce qui signifie qu'il ne récoltera à l'automne que de minuscules pommes de terre. «Le commerce ne me les prendra pas», explique l'agriculteur.
Le Bernois n'est pas le seul à vivre cette galère. Stefan Krähenbühl, agriculteur biologique de Greng dans le canton de Fribourg, au bord du lac de Morat, s'attend également à ne pas pouvoir écouler nombre de ses patates douces parce qu'elles sont trop petites. Il n'aura pas plus de chance au marché hebdomadaire, où les consommateurs sont cependant moins regardant sur l'esthétique des légumes que dans les supermarchés. Il en sait quelque chose, puisqu'il a encore sur les bras ses patates douces miniatures invendues de l'année dernière.
Les consommateurs devraient également acheter des produits B
L'agriculteur biologique appelle donc les consommateurs à acheter également les légumes imparfaits: «Réduisons le gaspillage alimentaire!» Une bonne action pour l'environnement en plus de soutenir des agriculteurs aux revenus rendus précaires par les catastrophes naturelles. De tels dégâts auraient «autrefois provoqué une famine», rappelle Stefan Krähenbühl, tandis qu'aujourd'hui, de plus en plus de biens sont importés de l'étranger.
Selon les chiffres de l'assurance grêle suisse, les tempêtes des deux dernières semaines ont causé des dommages aux agriculteurs à hauteur de 44 millions de francs, avec un total de 6000 sinistres déclarés. Il s'agit là d'un montant «exceptionnellement» élevé, rapporte une porte-parole de l'assurance grêle. Outre la région du Seeland, d'où proviennent environ un tiers des légumes suisses, les cantons de Fribourg, d'Argovie, de Lucerne, de Zurich et de Vaud ont été particulièrement touchés.
«Je n'ai jamais connu une telle destruction auparavant», note l'agriculteur Viktor Hämmerli. Il estime que les dommages causés aux légumes seuls s'élèveront à environ 300'000 francs. Il devra également réparer la serre, pour un coût estimé à 150'000 francs.
Une partie seulement des dommages sera couverte
Au moins, «parce que nous avons encore des serres, tout n'est pas perdu». L'assurance contre la grêle devrait également couvrir au moins une partie des dommages. En outre, Viktor Hämmerli a pu envoyer en vacances une partie des ouvriers saisonniers; pour les autres, il va essayer de demander au canton une indemnité pour mauvais temps.
Il dit pouvoir se reposer sur le fait qu'il produit des légumes depuis 26 ans et qu'il a donc un peu d'argent de côté. «Ceux qui ne sont là que depuis peu de temps sont frappés beaucoup plus durement», explique le Bernois. D'autant plus que cette année a été exceptionnellement mauvaise pour les agriculteurs. En avril, il a fait si froid que les fleurs de cerisier et d'abricotier ont gelé dans les vergers ; en mai, la pluie constante n'a pas permis de semer les jeunes plants à temps. Et maintenant, les vents violents et la grêle ont rasé les champs, tordu les arbres fruitiers et détruit des récoltes entières.
Pour Viktor Hämmerli, ce n'est pas sans conséquences : Il devra reporter les investissements qu'il avait prévus dans un avenir proche. Par exemple le passage à un chauffage à copeaux de bois non fossile pour les serres. Ou l'achat d'une houe robotisée pour réduire l'utilisation des pesticides. «Cela fait mal», dit-il, «car les deux auraient été bénéfiques pour l'environnement».