Le commentaire publié ce mercredi distribuait des baffes. «Genève Aéroport, vous êtes au top de l’irrespect. […] Rangez votre ignoble greenwashing et commencez par supprimer vos vols vers Paris, Francfort et autres destinations à moins de quatre heures de train», balançait le bien nommé compte Perle de greenwashing sous la publication LinkedIn de l’institution sise à Cointrin. Résultat: plus de 100 likes et une équipe de communication visiblement bien embarrassée.
La preuve? Le post de la discorde, mis en ligne mardi et «aimé» par une dizaine d’internautes, a été supprimé depuis. Il vantait les efforts fournis pour réduire l'impact climatique de l'aéroport. «Pour un tourisme véritablement durable, tout le monde doit faire sa part, pouvait-on lire. Genève Aéroport réduit sa dépense énergétique, produit des énergies renouvelables, sort des énergies fossiles pour atteindre la neutralité CO2 d’ici à 2037. Et vous, que faites-vous?»
Avant de suggérer une piste (c’est le cas de le dire) au public: compenser ses émissions en investissant — à travers le site internet de Genève Aéroport — dans un projet de fabrication et de distribution de fours solaires à haut rendement à Madagascar.
«Quelle insolence!»
«'Tout le monde doit faire sa part'; 'Et vous, que faites-vous?' A ce niveau-là, ce n’est plus du greenwashing, c’est de l’inconscience mêlée à une prétention sans borne», s’insurgeait Perle de greenwashing. Et la page aux 33’000 followers de poursuivre: «Est-ce que vous êtes au courant que réduire [ses émissions de gaz à effet de serre] et [les] compenser sont deux choses différentes? Pensez-vous vraiment que s’il suffisait de compenser nos émissions, on serait dans une situation climatique pareille?»
Sans oublier de magner l'ironie pour appuyer où ça fait mal. «Heureusement que vous sensibilisez les Malgaches à la protection de l’environnement… Quelle insolence quand on sait qu’un vol Genève-New York émet autant que vingt d’entre eux pendant un an.»
Ramenons le calcul au niveau individuel. Un aller-retour entre les deux villes onusiennes pèse 1,5 tonne de CO2 par passagère ou passager, selon le calculateur des services cantonaux de l’environnement. A Madagascar, la moyenne annuelle des émissions totales est de 0,2 tonne par personne, estime la Banque mondiale.
Les excuses de Genève Aéroport
Contacté, Genève Aéroport s’explique et s’excuse. La publication incriminée a été retirée, «car l’intention était maladroitement exécutée, ce qui pouvait heurter certaines personnes et nous nous en excusons», écrit Sandy Bouchat, cheffe du service communication. La porte-parole précise avoir aussi compris «qu’il faut un format plus extensif pour communiquer sur ces questions».
Sur le fond, un aéroport ne peut pas prendre de décisions à la place de Lufthansa, British Airways ou Swiss, soutient-elle en substance. «Les compagnies aériennes tentent de diminuer les émissions [de gaz à effet de serre] des vols. Les aéroports ont, quant à eux, leurs propres leviers. [Nous] avons mis en œuvre un certain nombre de mesures […].»
Outre la réduction de sa dépense énergétique et de ses émissions carbonées, Genève Aéroport encourage financièrement les transporteurs à acquérir des avions moins bruyants et moins polluants, par exemple. La «participation aux forums pour le développement de carburants alternatifs» figure aussi dans la liste transmise. «Ce sont des actions, pas des paroles», insiste Sandy Bouchat.
«Difficile pour un aéroport de communiquer sur ces questions»
Genève Aéroport ne souhaite toutefois pas répondre aux piques lancées par le compte Perle de greenwashing. «En règle générale, nous ne répondons pas aux commentaires liés à des décisions dépassant [nos] prérogatives ou concernant des débats de société telles que: 'faut-il réduire le nombre de vols ou cesser de voyager en avion?'»
Traduction: il est compliqué pour un aéroport de participer à la discussion sur le climat. Son discours est même devenu inaudible pour une partie de la population. «Je vous confirme qu’il est difficile […] de communiquer sur [ces] questions.» Jusqu’à ce 27 septembre, Genève Aéroport l’avait «relativement» peu fait.