Peter Scheidegger, 82 ans, apprécie sa vie de retraité. Il vit à Küssnacht am Rigi, dans le canton de Schwytz, à dix minutes du lac des Quatre-Cantons, dans un décor bucolique.
Peter a toujours reçu son courrier dans une case postale, où il se rend plusieurs fois par semaine. Il en profite pour discuter avec des connaissances et les employés. Il décrit le service fourni comme «compétent, et ce depuis des années».
Aujourd’hui, il ne s'y rendra pas. Peter a mis fin à sa case postale, après 45 ans de bons et loyaux services. «Je vais leur renvoyer les clés», dit-il. La raison de cette décision abrupte? A partir du 1er janvier 2022, le prix de celle-ci passe de la gratuité… à 120 francs par année.
De 0 à 120 francs
Pour Peter, l’issue du problème est vite trouvée. «120 francs, c’est trop», tonne-t-il. La Poste l’a informé de l’augmentation de la cotisation annuelle dans une lettre. Il est question d’une «optimisation» de l’offre. Tous les titulaires de cases postales ont reçu cette lettre au début du mois d’octobre. Ceux qui ne s’opposent pas explicitement à la nouvelle redevance acceptent tacitement l’offre.
Et Peter Scheidegger s’est explicitement prononcé contre. Il a répondu par une lettre envoyée directement au siège de l’entreprise à Bern-Wankdorf. Une lettre formulée avec un style pointu, pleine de déclarations sarcastiques, à l’orthographe irréprochable et un message sans équivoque. Il faut dire que Peter Scheidegger est un ancien journaliste. Il a peut-être pris sa retraite il y a longtemps, mais il sait encore écrire.
«Nous sommes remerciés par une facture»
«Nous sortions nous-mêmes notre courrier et nos colis de la boîte aux lettres tous les jours», écrit Peter Scheidegger. «Pendant des décennies, nous avons soulagé la poste d’une partie de sa livraison hebdomadaire. A l’avenir, la Poste nous 'remerciera' sans complexe de ce service par une facture de 120 francs par an, justifiée de manière plutôt aventureuse», poursuit le texte.
«À partir du 1er janvier 2022, nous n’aurons plus besoin de notre case postale. Nous serons, comme tous les ménages privés, desservis par le service de distribution quotidien de la Poste.»
Certains clients payaient 240 francs par an
La fin d’une histoire qui aura vécu plusieurs décennies. Car les cases postales ne sont plus aussi demandées qu’auparavant. Autrefois convoitées, leur nombre a fortement baissé. «Sur les 274’200 boîtes postales actuelles, 153’200 sont inutilisées en raison d’un manque de demande», indique Erich Goetschi, porte-parole de la Poste.
Il ne désire pas faire de commentaire sur le cas de Peter Scheidegger, si ce n’est pour préciser que certains clients avaient l’habitude de payer 240 francs par an, une espèce de pénalité lorsque le volumes des lettres était trop faible. La facturation a changé: tout le monde paie 120 francs pour sa boîte postale, quel que soit le nombre de lettres qu’il reçoit.
«Certaines boîtes postales demandées par la Poste elle-même resteront gratuites à l’avenir», déclare Erich Goetschi, «par exemple dans les villages très montagneux où la livraison à domicile est trop dangereuse en raison des chemins escarpés.»
Quant à Peter Scheidegger, sa maison ne répond pas à ces critères. Il remplacera désormais sa promenade matinale jusqu’à la case postale par une longue promenade avec le chien.