Christian Levrat vit ses derniers jours de parlementaire. Le Fribourgeois démissionnera ce vendredi du Conseil des États. Sitôt les derniers votes effectués, il aura les yeux tournés vers son prochain mandat: président du conseil d'administration de La Poste.
La «Weltwoche», proche de l'UDC, ne s'est pas privée de lancer une dernière torpille à l'ancien président du PS. Comme le révèle l'hebdomadaire alémanique, Christian Levrat a demandé une compensation de 12'000 francs pour sa période d'initiation de deux mois à La Poste (octobre et novembre).
Du point de vue du Gruérien et du conseil d'administration actuel, les grosses échéances à venir pour le géant jaune nécessitent une familiarisation rapide avec les enjeux. Cela implique de nombreuses réunions préparatoires et heures de travail durant les mois d'octobre et de novembre, selon La Poste.
Un flou juridique
«Il est important pour l'avenir du groupe que le président du conseil d'administration puisse prendre les bonnes décisions dès son entrée en fonction et ne pas passer les six premiers mois à chercher son chemin», explique Christian Levrat lui-même.
Le conseil d'administration de la Poste était disposé à lui verser à cet effet une indemnité mensuelle de 6000 francs pour octobre et autant pour novembre. Comme la Poste appartient à la Confédération et que la rémunération des membres du conseil d'administration relève de la compétence de celle-ci, le titulaire actuel du poste Urs Schwaller a porté l'affaire devant les départements concernés, à savoir le Département de l'environnement, des transports, de l'énergie et de la communication (DETEC) et le Département des finances.
Ce dernier a transmis la demande à l'Office fédéral du personnel, qui lui est subordonné, et qui a signalé des difficultés juridiques. En conséquence, selon le récit de Christian Levrat, un accord a été conclu le 5 juillet 2021 pour renoncer à toute indemnisation.
Les choux gras de la «Weltwoche»
Ce dossier fait les choux gras de la «Weltwoche», qui avait déjà pris un malin plaisir à révéler «l'affaire Berset». Avant même son entrée en fonction, Christian Levrat profite de chaque occasion pour se graisser la patte en bon capitaliste, dénonce le magazine dirigé par Roger Köppel (conseiller national UDC).
L'hebdomadaire zurichois y voit une situation cocasse («Lui qui fustige systématiquement tous ceux qui sont financièrement aisés...) et un faux-pas en tant que président du conseil d'administration de La Poste Suisse avant même d'être entré en fonction.
Or, Christian Levrat n'aurait pas été le seul à être indemnisé par le géant jaune avant d'en être un collaborateur effectif. La Poste avait également versé une avance à son patron Roberto Cirillo. «Le conseil d'administration avait souhaité nommer son CEO dès le 1er janvier 2019. Ce n'était pas possible pour lui, donc il a été employé et indemnisé pendant trois mois à un taux réduit», répond le groupe sur demande de Blick.
«Il aurait été plus sage de renoncer»
C'est ce que montre également le rapport 2019 sur les salaires des cadres. On y lit: «Outre les versements réguliers du salaire au 1.4.2019 pour un montant de 405'000 francs, la part fixe du directeur du groupe comprend également une indemnité de familiarisation et de déplacement entre janvier et mars 2019 pour un montant de 82'500 francs.»
Comparés aux plus de 80'000 francs de Roberto Cirillo, les 12'000 francs de Christian Levrat semblent modestes. Mais même si personne n'aime travailler gratuitement pendant deux mois, l'ancien président du PS ne devrait pas avoir de soucis financiers.
En tant qu'élu du Conseil des États, il perçoit un salaire annuel d'environ 150'000 francs, et son poste de président de l'union douanière Garanto — qu'il abandonnera fin novembre — est également rémunéré.
Son accession au conseil d'administration de La Poste lui promet une belle revalorisation salariale: 250'000 francs sont prévus comme rémunération à son nouvel emploi. Le socialiste aurait dû anticiper qu'au vu de ces montants (publics), sa demande de «rallonge» de 12'000 francs ne serait pas bien accueillie par le public. «Il aurait été plus sage de renoncer d'emblée à toute compensation», reconnaît le Fribourgeois.