Coup dur pour la capacité de défense de la Suisse: la Confédération n'est pas près de recevoir sa commande de 300 millions de francs pour des armes guidées supplémentaires de type PAC-3 destiné au système Patriot. Un contrat d'acquisition avait été signé l'automne dernier avec les Etats-Unis pour une telle livraison, censée renforcer la capacité de défense du pays. Mais le Département de la défense (DDPS) devra finalement faire sans – pour l'instant, d'après plusieurs sources.
Et la raison de ce revirement est simple: les Américains veulent d'abord fournir leurs missiles Patriot supplémentaires à l'Ukraine. Celle-ci croule sous les bombes de la Russie depuis plusieurs mois et demande sans cesse aux puissances mondiales de lui fournir davantage de systèmes de défense aérienne. C'est désormais chose faite pour Washington.
La Suisse devrait donc prendre son mal en patience, et ce, malgré des contrats manuscrits valables. La durée du délai de livraison n'est pas connue. Mais une chose est sûre: la demande mondiale dépasse actuellement de loin la production des missiles Patriot. Les Etats-Unis devraient communiquer officiellement sur leur décision ce mardi.
Un échange circulaire avec Berlin
La livraison des missiles Patriot fait l'objet de discussions depuis bien longtemps à Berne. En mai, le ministre allemand de la Défense Boris Pistorius avait déjà proposé à la Suisse un échange de bons procédés pour les Patriot sous la forme d'un accord circulaire. La Confédération devait laisser aux Allemands la livraison prévue jusqu'en 2030 et n'être elle-même livrée qu'ultérieurement pour que Berlin, qui aide l'Ukraine avec des missiles antiaériens Patriot, puisse combler plus rapidement ses propres lacunes.
Cet échange circulaire aurait pu poser problème – pour des raisons de neutralité, notamment. La ministre de la Défense Viola Amherd a uniquement confirmé des discussions en cours avec Boris Pistorius. La présidente de la Confédération n'a pas voulu s'aventurer plus loin, sachant pertinemment que les milieux bourgeois exprimeraient des réserves quant à un tel accord.
Les Etats-Unis font valoir des raisons inhabituelles ou impérieuses
Les réticences des partis bourgeois s'appuient sur la politique de neutralité – mais pas que. La Suisse a elle-même besoin des missiles Patriot: elle ne possède pas de moyens de défense aérienne à moyenne et longue portée contre les attaques de missiles, rappellent les politiciens en charge de la sécurité.
Les Etats-Unis ont désormais pris une décision à la place du Conseil fédéral. Exit un éventuel échange circulaire: la livraison des Etats-Unis vers l'Ukraine se fera désormais de manière directe. Selon les contrats conclus avec Washington, des clauses prévoient de s'écarter des conditions convenues si des raisons inhabituelles ou impérieuses le justifient et si les intérêts de sécurité nationale des Etats-Unis sont concernés. La guerre en Ukraine semble donc tomber sous cette définition.