Donald Trump l’a toujours dit. Il adore les bons «deals»: ceux dont lui, où son pays, les États-Unis, sont assurés de sortir gagnants, surtout financièrement. L’ancien président estime-t-il que l’OTAN, cette alliance atlantique dominée par Washington, est un mauvais «deal», au point de menacer de s’en retirer et de convier quasiment Vladimir Poutine à attaquer ses alliés européens?
La réponse est plus complexe. Ce que fait Trump est simple: semer la peur et le doute pour faire monter les enchères au sein d’une organisation indispensable à la puissance américaine.
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Lâcher l’OTAN serait un aveu de faiblesse
Donald Trump déteste apparaître faible. Il est, en campagne, la caricature du politicien viril prêt à tout pour défendre la sécurité des États-Unis. Or, quitter l’OTAN serait aussitôt interprété par les adversaires de l’Amérique comme un aveu de faiblesse. A quoi bon continuer de consacrer 3,6% du budget national à la défense (soit presque deux fois plus que la plupart des 30 pays européens membres de l’OTAN) si cet argent ne sert pas à projeter l’image d’un empire américain imbattable? Or, la puissance militaire des États-Unis, ne l’oublions jamais, vient aussi de la présence massive de ses troupes en Europe (environ 70 000 soldats), ou dans des pays alliés comme le Japon ou la Corée du Sud. Trump le sait parfaitement: sans l’OTAN, son Amérique perdra un énorme levier d’influence.
Lâcher l’OTAN ne rapporterait rien, au contraire
Trump est obsédé par les «deals» financiers. Tout ce qu’il signe doit rapporter. Il applique sa mentalité de promoteur milliardaire new-yorkais aux affaires de l’État. Or lâcher l’OTAN, cette alliance qui oblige – sans aucune clause dans le traité fondateur mais… – les Européens à acheter du matériel américain serait une énorme perte pour le complexe militaro-industriel qui, aux États-Unis, pèse très lourd. La tactique de Trump est claire: il fait dans la surenchère pour semer la peur, dans l’espoir que les Européens commanderont encore plus d’armes «Made in USA» afin d'atteindre les 2% du PIB consacrés à la défense, recommandés par l'Alliance depuis 2003. Problème: plus il sème la panique, moins il incite ses partenaires à faire confiance à son pays. Et à son industrie.
Lâcher l’OTAN, c’est perdre sa stature internationale
Vous imaginez un président Trump qui signerait, devant le monde entier, le retrait des États-Unis d’une alliance crée en 1949 à San Francisco, symbole s’il en est de la «pax americana»? La réponse est non. Impensable. Inimaginable, même pour le propriétaire de la Trump Tower. Aussitôt, Donald Trump perdrait sa stature internationale. Un isolationnisme comme celui de l'entre-deux guerres est aujourd’hui impossible. L’économie américaine, surtout celle du secteur des nouvelles technologies, dépend trop de la mondialisation et le marché européen est le plus lucratif pour les GAFAM, les géants de l’Internet. Trump ne tuera pas cette poule aux œufs d’or.
Lâcher l’OTAN, c’est satisfaire la Chine
A long terme, pour les États-Unis, la Russie ne compte pas sur le plan stratégique. C’est la Chine qui compte, car elle est l’adversaire de la puissance américaine, qu’elle pourrait surpasser d’ici 2050. Or, si Trump lâche les Européens, le signal sera clair: jamais son pays n’interviendra pour sauver Taïwan d’une possible invasion chinoise. Xi Jinping en tirera aussitôt les conséquences en poussant ses pions. L’Amérique égoïste de Trump se retrouvera défiée. Le magnat new-yorkais se retrouvera le dos au mur.
Lâcher l’OTAN, c’est mentir aux Américains
L’Organisation du traité de l’Atlantique Nord n’est pas perçue, aux États-Unis, comme un problème. L’aide militaire à l’Ukraine reste populaire, même si elle est aujourd'hui prisonnière du féroce combat politique entre Républicains et Démocrates au Congrès. Il ne faut pas oublier que les anciens soldats ou anciens combattants sont nombreux parmi les électeurs de Trump. Beaucoup ont fait leurs classes dans les bases européennes de l’OTAN. Or jamais ils n’ont réclamé la fin de cette Alliance. Trump est habitué aux mensonges. Ils les multiplient. Mais celui-ci, sur l’OTAN, se retournerait à coup sûr contre lui. D’autant que plusieurs États décisifs pour la présidentielle de novembre comme la Pennsylvanie, le Michigan, ou l’Ohio comporte d’importantes diasporas européennes (Pologne, Ukraine).