Arrivé légèrement en retard dans la salle Saint-George du Kremlin pour son discours très attendu devant l'élite politique russe, ainsi que des représentants religieux, et près un discours de moins d'une heure, Vladimir Poutine a signé les documents d'annexion aux côtés des dirigeants des régions séparatistes d'Ukraine de Donetsk et Lougansk (est) et de celles occupées par les troupes russes de Zaporijjia et de Kherson (sud).
Lors de son discours au Kremlin, le président russe Vladimir Poutine a appelé ce vendredi l’Ukraine à «cesser immédiatement les hostilités» et à négocier la paix, malgré les récentes déconvenues des troupes de Moscou, dont une poche est depuis vendredi partiellement encerclée dans la ville stratégique de Lyman (est). Pourtant, il s’apprête à officialiser les annexions des quatre régions ukrainiennes, après des «référendums» dénoncés par Kiev et les Occidentaux.
«Nous appelons le régime de Kiev à cesser immédiatement les tirs, toutes les hostilités et à revenir à la table des négociations», a déclaré le chef du Kremlin, devant le gouvernement, les députés et sénateurs, et d’autres représentants de l’Etat russe.
«Nos citoyens pour toujours»
Vladimir Poutine l’assure: «Les habitants de Lougansk et Donetsk, Kherson et Zaporijjia deviennent nos citoyens pour toujours», a affirmé le président russe devant l’élite politique du pays. «Les gens ont voté pour notre avenir commun», a-t-il ajouté.
Pourtant, le chef du Kremlin assure qu’il n’a pas de motivations impérialistes. Il a en effet assuré vendredi que son pays «n’aspire pas» à restaurer l’URSS, malgré l’offensive en Ukraine et l’annexion de quatre régions ukrainiennes à la suite de «référendums» dénoncés par Kiev et les Occidentaux.
«L’URSS a disparu, le passé ne peut être ramené. Et la Russie n’a pas besoin de cela aujourd’hui, nous n’y aspirons pas», a-t-il déclaré lors d’un discours au Kremlin devant l’élite politique russe.
A lire aussi
«L’Occident pille le monde entier»
Le président russe Vladimir Poutine a également accusé l’Occident de vouloir faire de la Russie une «colonie».
«L’Occident est prêt à tout pour préserver le système néocolonial qui lui permet de parasiter et, en réalité, de piller le monde entier», a dénoncé le président russe devant l’élite politique. «Ils veulent nous voir comme une colonie», a-t-il encore fustigé.
Il a aussi accusé les Anglo-Saxons d'être à l'origine des «explosions» qui ont provoqué des fuites sur les gazoducs Nord Stream 1 et 2, construits pour acheminer le gaz russe en Europe, une attaque qu'il avait déjà qualifiée jeudi «d'acte de terrorisme international».
«Annexion illégale»
Ces annexions interviennent après sept mois d'offensive russe en Ukraine et des «référendums» organisés en urgence dans les régions occupées, qui ont été dénoncés comme des «simulacres» par Kiev et ses alliés, qui ont juré de ne «jamais» en reconnaître les résultats.
Signe de cette précipitation et d'une certaine désorganisation, le porte-parole du Kremlin a annoncé devoir «clarifier» si la Russie annexait la totalité des régions ukrainiennes de Kherson et de Zaporijjia ou uniquement les parties qu'elle occupe.
Les dirigeants des pays de l'Union européenne ont publié vendredi une déclaration «rejetant» et «condamnant» cette «annexion illégale», accusant Moscou de mettre «la sécurité mondiale en danger». Les Etats-Unis, le G7 par ses ministres des affaires étrangères ainsi que le Conseil de l'Europe à Strasbourg ont également condamné fermement l'annexion.
La place Rouge accueille des festivités
La capitale russe se prépare, quant à elle, à des festivités ce vendredi, avec notamment un concert à l'ombre des murs du Kremlin, lors duquel le président russe pourrait faire une apparition.
Une foule de quelques milliers de personnes s'approchait en début de soirée de l'emblématique place Rouge avec des drapeaux russes, selon des journalistes de l'AFP.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky doit tenir une réunion de son Conseil de sécurité destiné à trouver des «solutions» à la situation. Il a pareillement rejeté toute négociation avec Moscou tant que Vladimir Poutine sera président.
Les forces russes en difficulté
Revendiquant son emprise sur ces territoires, la Russie, qui avait déjà annexé en 2014 la Crimée, péninsule du sud de l'Ukraine, a menacé de faire usage de l'arme nucléaire pour les défendre. Le Conseil de sécurité de l'ONU doit voter vendredi sur une résolution condamnant ces «référendums».
Sur le front, les forces de Moscou étaient pourtant en difficulté à Lyman, important nœud ferroviaire dans l'Est qui est «partiellement encerclé» par les troupes ukrainiennes, selon le responsable séparatiste prorusse Denis Pouchiline.
Frappe sur des civils
La matinée de vendredi a été endeuillée par une frappe russe particulièrement meurtrière sur une colonne de voitures de civils non loin de la limite entre la zone ukrainienne et la zone occupée de la région de Zaporijjia, l'un des quatre territoires devant être incorporés par Moscou.
Au moins 25 personnes ont été tuées et 50 autres blessées dans cette frappe, selon le parquet ukrainien, les deux camps se rejetant la responsabilité du bombardement.
Les journalistes de l'AFP sur place ont vu une quinzaine de voitures aux vitres soufflées et au moins trois cadavres de femmes au sol, des affaires dispersées à terre. La frappe a touché le parking d'un centre de transit pour déplacés, situé à une dizaine de mètres.
A deux kilomètres de la ville de Zaporijjia, sous contrôle ukrainien, et à quelques dizaines de kilomètres de la zone occupée par les Russes, les gens attendaient ici la permission pour retourner dans les territoires sous contrôle russe, une procédure qui prend du temps.
Le président ukrainien a traité la Russie de «terroriste» et de «racaille sanguinaire» après cette frappe.
(AFP/ATS)