Les substituts à la viande ont-ils atteint leur plafond en Suisse? Le départ était pourtant canon: l’Office fédéral de l’agriculture (OFAG) rapportait 60 millions de francs de ventes de fausse viande en 2016, et le double en 2020. Mais la courbe de progression se tasserait, à en croire le rapport «Plant based food report 2024», publié en janvier 2024 par Coop.
L’étude du supermarché, portant sur l’alimentation végane en Suisse, explique que «la croissance est clairement en baisse depuis deux ans» et évoque une chute de 1,5% des ventes sur ces produits, en un an et dans toute la Suisse. La consommation de vraie viande, elle, stagne aux alentours de 50 kg par année et par habitant. Une moyenne tout juste inférieure au kilo de bidoche par semaine. La Confédération, elle, conseille un maximum de 240 g.
Les industriels toujours séduits
En matière de santé et d’environnement, les Suisses mangent toujours trop de viande. Mais que manque-t-il aux alternatives véganes pour s’imposer dans nos assiettes?
Si l’on écoute le son de cloche des industriels, la solution est de créer de nouveaux produits. Interrogée par Blick, Melanie Stebler, responsable chez Nestlé des alternatives à base de plantes, prêche l’innovation: 300 chercheurs s’y attèlent dans un centre de recherche à Lausanne. En ressortent des «nouveautés» transformées, comme le «Marine-Style Crispy Filet» (une nouvelle alternative végétale au poisson).
Même son de cloche chez Lidl Suisse. Contacté, le service de communication de l’enseigne d'origine allemande évoque «une croissance des produits alternatifs à base de plantes», alors que les denrées d’origine animale restent largement majoritaires. Seulement 5% des produits laitiers seraient d’origine végétale, mais l'entreprise nous assure viser au moins 10% d'ici à 2030.
Moins de produits transformés, plus de lentilles
Faire des saucisses de soja goût merguez ou du ris de veau avec du blé n’est pas la solution pour Marlyne Sahakian, professeure de sociologie à l’Université de Genève (UNIGE). «Je ne suis pas nécessairement convaincue qu’il faille ces produits transformés, répond la coautrice du projet Swiss Diets (voir ci-dessous). Je pense qu’il y a des produits non transformés tels que les lentilles qui sont tout à fait adaptés à des régimes moins carnés et qui se produisent de plus en plus en Suisse.»
Le projet de l'UNIGE Swiss Diets étudie les possibilités d'une alimentation saine et durable en Suisse. Voici ses grands principes:
- La plupart des prescriptions concernent la santé humaine; un petit nombre repose sur la durabilité environnementale.
- La plupart des Suisses reconnaissent la nécessité d’avoir une alimentation équilibrée, généralement associée à la pyramide alimentaire suisse.
- Manger comme source de plaisir et l’idée de convivialité est une prescription dominante, aux côtés d’une alimentation équilibrée.
- Les prescriptions pour une alimentation naturelle et biologique ainsi que locale et saisonnière s’entrecroisent souvent.
- Les aliments «locaux», souvent vus comme réduisant la distance de la ferme à la fourchette, sont de plus en plus considérés comme équivalant à des aliments sains et durables.
- Manger moins de viande d’une meilleure qualité est souvent en opposition avec des régimes végétariens et végétaliens; pour certains, manger moins de viande est une étape vers une alimentation végétarienne. Pour d’autres, la consommation de produits d’origine animale pose des questions éthiques liées au bien-être des êtres vivants.
- Les régimes amaigrissants sont parfois vus comme étant sains, mais peuvent ne pas respecter l’idée du plaisir et de la convivialité.
Le projet de l'UNIGE Swiss Diets étudie les possibilités d'une alimentation saine et durable en Suisse. Voici ses grands principes:
- La plupart des prescriptions concernent la santé humaine; un petit nombre repose sur la durabilité environnementale.
- La plupart des Suisses reconnaissent la nécessité d’avoir une alimentation équilibrée, généralement associée à la pyramide alimentaire suisse.
- Manger comme source de plaisir et l’idée de convivialité est une prescription dominante, aux côtés d’une alimentation équilibrée.
- Les prescriptions pour une alimentation naturelle et biologique ainsi que locale et saisonnière s’entrecroisent souvent.
- Les aliments «locaux», souvent vus comme réduisant la distance de la ferme à la fourchette, sont de plus en plus considérés comme équivalant à des aliments sains et durables.
- Manger moins de viande d’une meilleure qualité est souvent en opposition avec des régimes végétariens et végétaliens; pour certains, manger moins de viande est une étape vers une alimentation végétarienne. Pour d’autres, la consommation de produits d’origine animale pose des questions éthiques liées au bien-être des êtres vivants.
- Les régimes amaigrissants sont parfois vus comme étant sains, mais peuvent ne pas respecter l’idée du plaisir et de la convivialité.
Marlyne Sahakian s’est intéressée au chemin vers une alimentation saine et durable pour les Suisses. Si ces derniers font partie des bons élèves dans le monde en matière d’alimentation équilibrée, de nombreux efforts restent à faire, selon la spécialiste.
Local n’est pas égal à durable
«Quand j'achète un steak, je contrôle toujours qu'il vienne d'ici», disent une bonne partie des Suisses, assimilant souvent les produits locaux à la durabilité. Un sentiment qui n'est qu'à moitié vrai. Swiss Diets donne les exemples du bœuf et des produits laitiers, des denrées très présentes dans notre régime. Même si la viande et le lait viennent du village d'à côté, ces deux produits coûteront cher en empreinte carbone.
Et les légumes? Acheter ses tomates chez l'agriculteur du coin soutient l'économie locale et limite les trajets. Est-ce durable? Pas forcément. «Les fruits et légumes produits localement pendant l’hiver demandent une grande quantité d’énergie fossile pour chauffer et éclairer les serres», lit-on dans le rapport.
«Les systèmes concernés devraient prendre leurs responsabilités»
Mais comment faire si même consommer local n'est pas nécessairement durable? «Je suis convaincue que la responsabilité ne devrait pas se reposer uniquement sur les épaules des consommateurs et des consommatrices», martèle Maryline Sahakian.
La professeure donne l’exemple des grandes surfaces actuelles: «Si vous cherchez à acheter un produit qui est d’une haute durabilité au niveau social, éthique, écologique, vous allez passer des heures à trouver votre pâte feuilletée.»
Laisser la décision aux consommateurs n’est pas efficace selon elle. Elle préconise des actions en amont: «Les systèmes de production et de distribution devraient prendre leurs responsabilités envers une consommation locale, durable, etc.»