Les affrontements pour la ville industrielle de Bakhmout sont devenus la bataille la plus longue et probablement la plus meurtrière de l'attaque russe contre l'Ukraine depuis le début du conflit.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a reconnu pour la première fois des difficultés dans la nuit de mercredi à jeudi. Mais aucune des deux parties ne veut abandonner - malgré la précarité de la situation. Un aperçu de la situation sur le front de Bakhmout en cinq points.
A lire sur la guerre
La ligne de front
Les troupes ukrainiennes sont encerclées à Bakhmout, attaquées de trois côtés. Seul un front reste ouvert vers l'ouest, mais pour combien de temps encore?
Car les troupes russes ont fait de grands progrès le mois dernier autour de la ville. C'est ce que montrent les données de l'Institute for the Study of War, un think tank américain. Il montre que les contre-attaques des Ukrainiens sont infimes.
Le blogueur militaire russe «Milchronicles» spécule que les forces russes pourraient ensuite tenter un double encerclement de Bakhmout. La ligne d'approvisionnement ukrainienne dans le Donbass serait ainsi coupée. Ce serait probablement le coup de grâce pour la défense ukrainienne à Bakhmout.
La ville
Environ 70'000 personnes vivaient à Bakhmout avant l'invasion. En décembre déjà, il ne restait plus que 10'000 personnes. Le reste des habitants ont fui ou ont été tués, précise le portail ukrainien «LB».
Les troupes ukrainiennes affirment qu'il est difficile de dire combien de civils se trouvent encore à Bakhmout, les estimations se situant désormais entre 1'000 et 5'000. La ville elle-même a été rasée. Des photos montrent des maisons en ruine, des rues ensevelies, le ciel est gris et sombre à cause de la fumée des bâtiments en feu. Une ville devenue fantôme.
Les armes
La lutte pour Bakhmout a dégénéré en une violente bataille de matériel. Chaque jour, les deux camps se tirent dessus avec des milliers et des milliers d'obus. Mais même les stocks de munitions de l'Ukraine, rembourrés par l'Occident, ne sont pas infinis.
Il est de notoriété publique que l'armée ukrainienne n'a presque plus de munitions pour se défendre contre les Russes. Oleksiy Reznikov, ministre de la Défense de l'Ukraine, a déclaré à ses collègues de l'Union européenne, que Kiev a besoin d'au moins 250'000 obus d'artillerie de 155 millimètres par mois pour pouvoir se défendre contre la Russie dans le Donbass. Mais ils n'en ont pas. Et le ravitaillement en provenance de l'ouest se fait toujours attendre.
Les soldats
«Pour moi, le plus important est que nous ne perdions pas nos soldats», a déclaré le président Volodymyr Zelensky ce jeudi. Et pourtant, le commandement militaire ukrainien continue d'insister pour défendre la «forteresse de Bakhmout». Mais ce n'est pas pour rien que la ville a reçu ces derniers mois le surnom morbide de «hachoir à viande». Selon des estimations, les Ukrainiens y perdent 100 à 200 soldats par jour, écrit «The Guardian».
Selon le «Welt», certaines compagnies ukrainiennes ont perdu plus de 80% de leurs soldats. Pour combler ces lacunes, l'Ukraine doit envoyer davantage de renfort sur le front. Toutefois, l'Ukraine manque cruellement de soldats bien formés et l'Etat ne communique pas officiellement sur le nombre de pertes humaines dans le conflit.
Le moral des troupes
Ces dernières semaines, des dizaines de vidéos postées par des soldats ukrainiens dans et autour de Bakhmout ont fait leur apparition sur Tiktok, dans lesquelles Volodymyr Zelensky est prié d'ordonner le retrait. C'est ce qu'écrit «The Guardian».
Un retrait n'est pourtant guère possible malgré un moral en berne, la force symbolique de cette petite ville industrielle étant trop importante. L'Ukraine a donné une importance politique à Bakhmout, et le président a fait de la ville un symbole de résistance. D'un point de vue militaire, un retrait devrait néanmoins sans doute bientôt devenir indispensable. «Bien sûr, les généraux sur place prendront les bonnes décisions s'il y a un risque que nous perdions nos hommes parce qu'ils sont encerclés», déclare Volodymyr Zelensky, faisant allusion à un éventuel retrait.