Éloignez-les! Telle est la devise britannique en matière de gestion des migrants. Depuis 2018, près de 130'000 bateaux transportant jusqu'à 50 passagers en moyenne ont débarqué illégalement sur les rives du royaume. Mais cela devrait cesser à présent.
Le Parlement a adopté une loi qui prévoit l'expulsion des migrants entrés illégalement vers le Rwanda – visant ainsi à dissuader les migrants à fuir vers le royaume. Le Premier ministre Rishi Sunak le promet: dès cet été, les premiers vols spéciaux atterriront à Kigali, la capitale du Rwanda. Seules deux choses pourraient encore arrêter cette décision radicale.
Les pilotes des vols spéciaux peuvent interrompre le décollage vers Kigali si l'ambiance à bord est trop intense. Ou le roi Charles III qui pourrait, par veto, annuler toute décision du Parlement. Le «non» royal est toutefois peu probable. La dernière fois que la reine Anne s'est immiscée dans le processus législatif britannique, c'était en 1708.
Londres ignorera un éventuel jugement de la CEDH
Mais les tribunaux britanniques ont de facto les mains liées après l'adoption de la loi. Et l'avis de la Cour européenne des droits de l'homme a autant de valeur à Londres qu'une tasse de thé irlandais froid. Le Premier ministre Rishi Sunak l'a clairement fait savoir en soulignant qu'une décision de justice correspondante de Strasbourg serait tout simplement «ignorée».
En bref: les vols vers le Rwanda sont prévus et seront réalisés, quoi qu'il arrive. Les réfugiés qui espéraient vivre en Grande-Bretagne devront décider entre demander l'asile au Rwanda à Kigali ou retourner dans leur pays d'origine.
L'expulsion des migrants pas avantageuse
Cette décision a été prise en raison des coûts élevés engendrés par l'hébergement des réfugiés. En raison du surpeuplement des logements, les autorités ont dû recourir à des hôtels pour loger les demandeurs d'asile. Les dépenses sont estimées à 7,7 millions de francs par jour.
«Migration Watch UK», une association opposée à la migration, imagine tout ce qui pourrait être faire avec cet argent: embaucher 52'000 infirmiers, payer 62'000 soldats ou former 37'000 policiers. Trêve d'illusion, l'expulsion des migrants vers le Rwanda sera tout sauf avantageuse.
Jusqu'à présent, le gouvernement britannique a fait transférer à Kigali l'équivalent de 330 millions de francs, alors qu'aucun réfugié n'y était encore arrivé. Selon l'Office britannique d'audit, il faudra ajouter jusqu'à 190'000 francs par migrant expulsé. La raison? Le Rwanda se fait grassement rémunérer pour son service de réfugiés, à l'abri des regards.
L'Europe suit de près la Grande-Bretagne
Les cris d'orfraie qui résonnent dans certains palais gouvernementaux européens en réaction à cette décision sont hypocrites. Le Parlement européen vient d'adopter un durcissement du droit d'asile. La nouvelle réglementation prévoit que les migrants devront à l'avenir déposer leur demande d'asile à la frontière extérieure de l'Europe et attendre ensuite la réponse aux portes de l'Europe.
Les problèmes qui poussent actuellement un nombre record de personnes à fuir – plus de 36 millions selon l'ONU – sont loin d'être résolus avec la seule expulsion des demandeurs d'asile. Les problématiques ne sont que repoussée... au-delà des frontières.
Mais sur un point au moins, le Premier ministre britannique se montre prêt à lutter contre les causes de la migration: mardi, il a annoncé augmenter ses dépenses d'armement à 2,5% du PIB en vue de la guerre d'agression russe contre l'Ukraine. Car si la Russie gagne, des dizaines de millions de nouveaux réfugiés afflueront vers l'Occident. Trop nombreux pour pouvoir tous les évacuer par avion vers le Rwanda…