L'historien Iouri Dmitriev, spécialiste de la répression stalinienne lui-même emprisonné en Russie, a été envoyé à l'isolement pour son «exécution incorrecte» des exercices sportifs physiques matinaux, selon l'ONG russe de défense des droits humains Mémorial. Iouri Dmitriev, âgé de 68 ans et à la santé fragile, a été placé vendredi «dans une cellule d'isolement punitive pendant six jours», a indiqué mardi soir cette organisation.
«La raison officielle de cette punition est 'une exécution incorrecte des exercices matinaux'», a-t-elle ajouté. Emprisonné depuis 2016, Iouri Dmitriev aura la semaine prochaine 69 ans, «dont huit passés en prison», et n'a pas bénéficié d'examens médicaux depuis huit ans, a dénoncé Mémorial. Or son état de santé «se détériore», a-t-elle ajouté.
Prisonnier suite à un coup monté
L'historien est une figure de Mémorial, organisation gardienne de la mémoire des victimes des goulags devenue cible de la répression sous Vladimir Poutine. L'ONG, co-lauréate du prix Nobel de la paix en 2022, a été interdite en Russie fin 2021. Iouri Dmitriev avait été arrêté en 2016 puis condamné en 2020-2021 pour violences sexuelles sur sa fille adoptive mineure. L'accusation lui reprochait d'avoir pris des clichés dénudés de la fillette, quand lui assure les avoir pris pour suivre la croissance d'une enfant car elle était dénutrie au moment de son adoption.
Mémorial, l'historien et ses nombreux partisans ont dénoncé un coup monté destiné à le punir pour ses recherches sur la terreur soviétique. Sa peine initiale de 13 ans de prison a été alourdie à 15 ans en 2021. Iouri Dmitriev dirigeait avant cela une antenne de Mémorial en Carélie, région du nord russe.
Il a passé des décennies à localiser des charniers et exhumer les restes des victimes de la répression stalinienne. Sous Vladimir Poutine, un ancien officier du KGB, l'organisation héritière des polices politiques de Lénine et Staline, l'accès aux archives d'Etat sur ces sujets a été considérablement réduit et les identités des exécutants des purges classées secrètes. Le fondateur de Mémorial, Oleg Orlov, était lui aussi emprisonné mais a été libéré en août dans le cadre d'un échange de prisonniers entre la Russie et l'Occident.