La mafia gagne des sommes incroyables grâce à son activité principale, le trafic de drogue, et cela a des répercussions jusqu’en Suisse. Selon les journaux de «CH Media», des lires italiennes d’une valeur d’environ 500 millions de francs suisses auraient été blanchies dans notre pays en 2007. Des diplomates seraient dans le coup.
Après l’introduction de l’euro en 2002, la mafia italienne aurait eu sur les bras des masses de lires, l’ancienne monnaie de la péninsule. «Les clans n’avaient pas réussi à les changer en euro», explique l’ancien mafioso Cosimo V.*.
Un témoin obtient une réduction de peine
Ce dernier témoigne actuellement lors d’un procès en appel contre la 'Ndrangheta calabraise et la Cosa Nostra sicilienne. En première instance, les deux chefs Giuseppe G.* et Rocco F.* avaient été condamnés à la prison à vie.
Cosimo V. a participé aux investigations en tant que témoin. Mais il avait lui-même été arrêté en 2009 lors d’une grande opération anti-mafia contre le clan Molè. Puisqu’il a immédiatement collaboré avec la justice, il a pu obtenir une réduction de peine. Il occupait une position élevée dans l’organisation criminelle ainsi que dans une loge maçonnique (un petit groupe local de francs-maçons). Il est considéré comme un témoin crédible.
Un système bien rodé
Selon Cosimo V., une société secrète influente, disposant d’un réseau mondial, aurait pris en charge la problématique des lires restantes à la mafia. Un «système Ugolini» devait permettre de convertir les 500 milliards de lires sales en euros propres.
Le noyau de ce système serait une loge maçonnique secrète appelée «La Fenice», fondée dans les années 1980 par le comte Giacomo Maria Ugolini. L’homme vivait en Egypte comme ambassadeur du petit Etat de Saint-Marin. Il aurait alors servi de relais entre la mafia, les loges maçonniques irrégulières, les services secrets, la politique et le Vatican. Pendant des décennies, ce réseau aurait organisé des fraudes internationales et des manipulations politiques.
Une voiture diplomatique pour transporter l’argent en Suisse
Cosimo V. a déclaré que les lires italiennes avaient été transportées en Suisse et déposées dans des banques locales. Ce travail a été effectué par un homme qui était autrefois ambassadeur du Nicaragua auprès du Saint-Siège. Le témoin a assuré que celui-ci était présent lorsque l’action a été envisagée et préparée. L’argent a d’abord été transporté de Calabre vers Rome, où l’ambassadeur l’a pris en charge pour le transporter en Suisse.
«Il a utilisé un véhicule diplomatique, une Audi A4, pour amener l’argent en Suisse», a déclaré Cosimo V. lors de l’interrogatoire.
La piste mène à Genève
L’ancien mafioso n’était pas seulement membre de la loge maçonnique secrète, mais aussi grand maître lui-même d’une loge régulière en Calabre. Cosimo V. possédait une entreprise de logistique et permettait ainsi à la mafia d’accéder au port de Gioia Tauro, par lequel transitait notamment le trafic de drogue. Il était en outre un confident du chef mafieux Rocco Molè, assassiné en 2008. Ce dernier aurait également commandité l’opération de blanchiment des 500 milliards de lires italiennes.
Selon le repenti, la Suisse a été choisie en raison de son système bancaire renommé et discret. Une autre raison semble avoir eu son importance, comme le confirme l’enquête de «CH Media»: le fils de l’ambassadeur du Nicaragua était alors accrédité auprès de l’ONU et de l’OMC à Genève.
*Nom connu