Le cliché mondialement connu de la petite fille au napalm, symbole de l'horreur de la guerre du Vietnam, cache-t-il un secret vieux de 50 ans? Le documentaire «The Stringer» présentée, samedi 25 janvier, au festival du Sundance aux Etats-Unis affirme en tout cas que l'auteur de la célèbre photo de Kim Phuc, 9 ans, fuyant une attaque aérienne au napalm, ne serait pas l'américano-vietnamien Nick Ut.
A l'origine du scandale, Carl Robinson, éditeur photo de l'agence Associated Press (AP) à l'époque, qui, rongé par les remords, a décidé de tout dévoiler. Il assure «avoir menti sur ordre de Horst Faas, le charismatique directeur de la photographie de l’agence», rapporte «Le Monde». Celui-ci aurait favorisé Nick Ut, membre de l'équipe de l'AP, au détriment d'un pigiste indépendant.
Pour cette photo légendaire prise en 1972, le pigiste anonyme aurait touché... 20 dollars. A l'inverse, les prix les plus prestigieux sont venus récompenser Nick Ut qui a ensuite vu sa carrière décoller.
Le pigiste retrouvé
Les auteurs du film à charge contre l'AP affirment avoir retrouvé l'auteur de la célèbre photo. Il s'agirait de Nguyen Thanh Nghé, chauffeur pour l'équipe américaine de NBC au Vietnam. «J’ai travaillé dur pour cette image, et c’est Nick Ut qui a tout remporté», assure-t-il. Il vit depuis 50 ans aux Etats-Unis.
Pour étayer ses propos, l'équipe du film a fait appel à l'association Index, spécialisée dans la reconstruction d'événements en vidéo et 3D. Leurs conclusions sont sans appel: il est improbable que Nick Ut soit l'auteur de l'image, car trop loin de la fillette. A contrario, l'association indique que le photographe se trouvait sûrement dans le groupe de journalistes où était Nguyen Thanh Nghé. Il est pourtant difficile aujourd'hui de trancher la question. La plupart des témoins de l'époque ont disparu. C'est donc surtout parole contre parole.
AP et Nick Ut démentent
L'agence Associated Press réfute les accusations tenues dans le documentaire. L'entreprise a mené une enquête durant six mois et a conclu dans un document de 20 pages que Nick Ut est bien l'auteur du célèbre cliché.
Nick Ut, par l'intermédiaire de son avocat, a fait savoir au «Monde» qu'il récusait toutes les allégations du documentaire. Le quotidien français explique également que le célèbre photojournaliste a tenté sans succès de s'oppose à la projection du film. L'affaire pourrait bien se poursuivre devant les tribunaux: «J’ai informé le cinéaste et le festival de Sundance que s’ils diffusaient le film, il y aurait une responsabilité pour diffamation», a annoncé James Hornstein, l’avocat de Nick Ut. Il semblerait donc que 50 ans après, la photo iconique nous réserve encore bien des surprises.