Un élu veut changer la situation
Des centaines de Suisses sanctionnés à leur insu à cause de Temu

Des centaines de Suisses sont sanctionnés chaque année pour avoir importé à leur insu des produits interdits, comme des pistolets à eau ressemblant à des armes. Des politiciens montent au créneau.
Publié: 30.03.2025 à 15:17 heures
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Les armes factices peuvent ressembler à s'y méprendre à des armes réelles. En Suisse, leur importation est interdite.
Photo: Blick
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Daniel Ballmer

L'affaire a fait couler beaucoup d'encre: un Argovien a commandé deux pistolets à eau roses pour ses filleuls sur la plateforme chinoise de vente en ligne Temu. Mais au lieu de recevoir son colis, il a eu une mauvaise surprise: la douane est intervenue. Au vu de leur ressemblance avec de véritables armes, ces répliques tombent sous le coup de la loi sur les armes. 

Importation illégale d'armes

Sans le savoir, l’homme s’est rendu coupable d’«importation illégale d’armes sur le territoire suisse sans autorisation». Et l'amende a été salée: 6500 francs.

Cette histoire n'est pas un cas isolé. De nombreuses personnes tombent chaque année dans le piège des achats en ligne. Chaque mois, le ministère public argovien prononce des sanctions similaires contre des acheteurs, accusé d'avoir importé des produits interdits en Suisse. 

Un conseiller aux Etats veut s’attaquer au problème

Le conseiller aux Etats du Centre, Beat Rieder, s’insurge contre cette situation. Lui-même avocat pénaliste, il a déjà défendu des personnes concernées. Il veut désormais modifier la loi sur les armes: les plateformes en ligne comme Temu ou Amazon devraient être tenues de signaler clairement les produits interdits en Suisse, ou alors être tenues pour responsables en cas d’infraction. «Aujourd’hui, on sanctionne des centaines de petits consommateurs, mais on laisse les grandes plateformes agir en toute impunité», dénonce-t-il.

Chaque année, des centaines de Suisses se retrouvent poursuivis sans savoir qu’ils enfreignent la loi en important des objets comme des frondes, des pointeurs laser, des sprays au poivre ou certaines répliques d’armes. «Ces géants du commerce en ligne génèrent des centaines de millions de francs en Suisse, mais ils ne se soucient absolument pas de leurs clients. Ils ne les informent pas que certains produits sont interdits et que leur importation est illégale», fustige le conseiller aux Etats.

«
L’Etat ne doit pas capituler face aux multinationales!
Beat Rieder
»

Dans une motion déposée récemment, il demande que ces entreprises soient également sanctionnées. «Elles ont des filiales en Suisse, et leurs employés pourraient être poursuivis pénalement. L’Etat ne doit pas capituler face aux multinationales! Elles trompent leurs clients en leur laissant croire que ces articles sont sans problème, alors qu’elles ne cherchent qu’à faire du profit.»

Si les plateformes en ligne ne peuvent pas être contraintes à mieux informer leurs clients ou à être poursuivies, Beat Rieder propose au moins de modifier la loi sur les armes. Selon lui, les infractions mineures liées à l’importation de ces «armes» ne devraient plus donner lieu à une procédure pénale, mais être sanctionnées par une simple amende administrative de 40 à 200 francs.

Des ressources précieuses gaspillées

Face à une justice déjà saturée, il met en garde contre un possible effondrement du système: des affaires importantes risquent de tomber en prescription tandis que des ressources précieuses sont gaspillées sur des dossiers mineurs. «Cette situation est intenable», conclut-il. Pour lui, seule une modification législative permettra de mettre fin à ce «gaspillage absurde». 

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