Le fils groenlandais de Trump
Au Groenland, personne ne veut de Trump. Sauf ce maçon

Ce maçon trumpiste en est convaincu. L'avenir du Groenland passera par les USA. Jørgen Boassen a organisé en catimini la venue de Donald Trump Jr en janvier à Nuuk. De paria à star locale, découvrez l'histoire de celui que l'on surnomme «le fils groenlandais de Trump».
Publié: 24.03.2025 à 16:57 heures
|
Dernière mise à jour: 24.03.2025 à 19:34 heures
1/5
Jørgen Boassen est fier de son coup. Ce maçon de 50 ans, trumpiste de la première heure, a organisé la visite «privée» de Donald Trump Jr. au Groenland
Photo: Niels Ackermann / Lundi13
Chroniques Teaser (5).png
Alessia BarbezatJournaliste Blick

Jørgen Boassen peut le savourer, son Pepsi max. Une boisson au petit goût de revanche pour ce fan de Donald Trump de la première heure. Au Bones, réplique d’un diner américain coincé dans le centre commercial de Nuuk – la capitale du Groenland – ce maçon de 50 ans n’est pas peu fier de raconter comment il a accueilli Donald Trump Junior en janvier dernier sur cette immense île arctique.

À l’extérieur, le thermomètre affiche moins 12 degrés. Les rares passants emmitouflés de pied en cap tentent tant bien que mal de garder l’équilibre sur les trottoirs verglacés de la plus petite capitale du monde (20 000 habitants), située à 240 km au sud du cercle polaire arctique. Jørgen Boassen, lui, se pavane en T-shirt noir siglé «American Badass», ravi de son petit effet. Imprimé sur le bout de tissu: le visage ensanglanté de son idole, poing levé, quelques secondes après avoir réchappé à la tentative d’assassinat contre lui.

Si les récentes visites de hauts responsables américains en l'espace de quelques jours au Groenland ont fait bondir le Premier ministre Múte B. Egede, nul doute qu'elles ravissent Jørgen Boassen.

L’histoire d’un maçon trumpiste

Son histoire, Jørgen Boassen, la déroule d’une traite. C’est qu’il l’a déjà débitée des dizaines de fois à des journalistes venus du monde entier, intrigués par ce personnage devenu une star locale. «Quand j’ai commencé à afficher mon soutien pour Trump sur Facebook en 2016, on se fichait de ma poire. J’étais le seul ici. Je passais pour un rigolo», dit-il amusé, appuyé contre la banquette du diner.

1:25
«Le fils spirituel de Trump»:Au Groenland, personne ne veut de Trump. Sauf lui.

Mais son abnégation finit par payer. L’homme aux cheveux noirs gominés se fait remarquer par Tom Dans, ex-commissaire des Etats-Unis à l’Arctique. Le Groenlandais est invité en Pennsylvanie à quelques jours de l’élection présidentielle de 2024 pour faire du porte-à-porte et convaincre les derniers indécis. 

Le 6 novembre, Jørgen Boassen assiste au triomphe de Donald Trump, au Palm Beach County Convention Center, en Floride. L’occasion pour lui de serrer la main au fils du 47ᵉ président américain et d’échanger son numéro avec le leader d’extrême droite britannique et artisan du Brexit, Nigel Farage. «On s’appelle de temps en temps», glisse-t-il, l’air de rien. 

Une visite «privée» qui fait jaser

Début janvier 2025, Charlie Kirk, un influenceur conservateur ultra-populaire aux USA, le contacte. «Il m’a demandé de réunir un petit groupe de personnes pour accueillir ‘Don Jr’ à l’aéroport et lui montrer la ville». Jørgen Boassen s’exécute. Et le 7 janvier, un Boeing 757 estampillé «Trump», se pose sur le tarmac gelé de la métropole arctique avec, à son bord, le fils de, pour une visite «privée» qui a fait polémique et grand bruit.

Le 7 janvier 2025, la «visite privée» de Donald Trump Jr. au Groenland a fait jaser. Sur l'île et dans le monde entier,
Photo: IMAGO/Ritzau Scanpix

Ni le gouvernement groenlandais, encore moins celui du Danemark, n’ont été prévenus. La veille, Donald Trump déclarait sur son réseau social «Truth» que «la propriété et le contrôle du Groenland [étaient] une nécessité absolue pour la sécurité nationale et la liberté à travers le monde». Quitte à envisager de l’annexer par la force.

Un scénario hautement improbable pour Jørgen Boassen. ««On ne va pas devenir le 51e Etat des USA. Trump ne nous veut que du bien. La preuve? Il veut la paix avec la Russie. Je peux vous dire que si Kamala Harris avait été élue, c’était la garantie d’une troisième guerre mondiale!»

A lire: notre reportage immersif au Groenland à la rencontre de ce peuple en quête d’indépendance

La veille de notre rencontre à Nuuk, l’extrême droite a réalisé une percée historique aux législatives allemandes. La nouvelle réjouit le Groenlandais. «Je suis contre l’ouverture des frontières en Europe et aux USA. L’Europe n’est plus l’Europe. On ne peut plus critiquer les politiciens. La liberté et la liberté d’expression n’existent plus», déplore cet ex-boxeur.

Sur l’île, la récente popularité de Jørgen Boassen fait grincer des dents. On le traite de «nazi», de «traître» ou d’«opportuniste». Il s’en soucie comme d’une guigne. Ce qui l’importe? Développer son business. «J’ai beaucoup de boulot avec les américains. Les compagnies minières m’appellent pour que je les aide à trouver de bons contacts ici, lâche-t-il énigmatique.»

Il repose son Pepsi Max. En avril, Jørgen Boassen s’envolera pour Mar-a-Lago. 

Découvrez nos contenus sponsorisés
Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la