L'Ukraine a l'OTAN, Poutine a les Tchétchènes. Les troupes hautement qualifiées du Caucase du Nord se battent depuis des semaines aux côtés de la Russie. Le 26 février, la télévision d'État russe Russia Today a annoncé que 12'000 Tchétchènes se battaient pour la Russie. On ignore toutefois où, et ce qu'ils y font exactement.
Leur réputation de brutalité démoralise l'adversaire et leur longue expérience des combats de rue leur permet de disposer d'un précieux savoir-faire. Le président tchétchène Ramzan Kadyrov est considéré comme l'un des plus proches alliés de Vladimir Poutine et soutient haut et fort la la campagne en Ukraine.
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Un fervent admirateur de Poutine
Le dirigeant tchétchène utilise un canal Telegram, où il peut publier sa propagande sans crainte d'être bloqué. Depuis le début de la guerre, il ne cesse de faire de la publicité pour la guerre à ses plus de deux millions de followers et se vante de l'importance des Tchétchènes pour le succès russe. Récemment, il a remplacé sa photo de profil par un portrait de Poutine, sans doute pour montrer à quel point il est loyal envers le dirigeant russe.
Leurs faits d'armes pourraient à présent inclure des querelles violentes avec d'autres troupes russes, indique le ministère ukrainien de la Défense sur son site Internet.
Une centaine de soldats impliqués
Selon ce rapport, un combat aurait eu lieu entre les Tchétchènes de Ramzan Kadyrov et les troupes de Bouriatie, une autre république autonome de Russie. L'escarmouche se serait produite dans le village de Kiselivka, occupé par la Russie, dans la région de Kherson. Une cinquantaine de soldats des deux côtés auraient été impliqués. Il y aurait eu des morts et des blessés, écrit le ministère ukrainien de la Défense, sans donner d'informations plus précises.
Plusieurs raisons sont avancées pour expliquer les combats. D'une part, les Tchétchènes auraient volé le butin que les Bouriates avaient fait auparavant.
Les Tchétchènes auraient abattu des déserteurs
Mais il s'agirait avant tout d'un conflit ethnique. Alors que les Bouriates, qui faisaient autrefois partie de l'empire mongol de Gengis Khan, se battent en première ligne, les Tchétchènes doivent attendre en arrière-plan. Leur mission principale, rapporte l'Ukraine: motiver leurs propres troupes à poursuivre le combat. Autrement dit, estiment les Ukrainiens: abattre les déserteurs.
On ne sait pas si cette répartition des rôles ne convenait plus aux Bouriates ou s'ils pensaient avoir plus de chances de lutter contre les Tchétchènes que contre les Ukrainiens. Quoi qu'il en soit, il s'agit d'une histoire de plus qui suggère à quel point le moral de l'armée de Poutine est en berne.
Propagande des deux côtés
Si tant est qu'elle soit vraie. Les informations ne sont pas vérifiables et l'Ukraine comme la Russie ne cessent de publier des informations fausses pour en tirer profit.
Ce qui est sûr, c'est que des Tchétchènes se battent également du côté ukrainien. Ceux-ci sont dirigés par Adam Osmaev, un politicien tchétchène en exil. Pour lui, les soldats de Ramzan Kadyrov sont des traîtres. «Les vrais Tchétchènes sont à vos côtés. Ils saignent avec vous, comme ils ont saigné au cours des huit dernières années», déclare Adam Osmaev.
La haine tchétchène envers Poutine
Les origines de la guerre de Tchétchénie remontent à l'effondrement de l'Union soviétique en 1991. La Tchétchénie voulait obtenir son indépendance, mais la Russie l'en a empêché par tous les moyens. Un accord de paix a été signé en 1996. Mais celui-ci n'a été que de courte durée. Des attentats terroristes ont été perpétrés à plusieurs reprises par des Tchétchènes en Russie, jusqu'à ce que les Russes occupent le pays en 1999 et y restent pendant plus de dix ans. Le siège de la capitale Grozny a été le triste point culminant de ce conflit, plusieurs dizaines de milliers de civils y ayant trouvé la mort.
En 2000, un an après le début de la guerre, Vladimir Poutine est arrivé au pouvoir en Russie. Il a nommé Akhmat Kadyrov (1951-2004), le père de Ramzan, à la tête de la Tchétchénie. Lorsque ce dernier a été assassiné, Ramzan a repris le flambeau.
De nombreux Tchétchènes sont restés fidèles à Adam Osmaev et soutiennent l'Ukraine. Ils craignent que l'Ukraine ne connaisse des scénarios d'horreur similaires à ceux de Grozny. On ne sait pas combien de Tchétchènes combattent du côté ukrainien.
(Adaptation par Jocelyn Daloz)