Sexisme et manque de tact
Armin Laschet, candidat à la succession de Merkel, choque au sujet des inondations

Dans une interview, Armin Laschet minimise l'impact du changement climatique sur les inondations en Allemagne, tout en traitant une journaliste avec paternalisme et condescendance. Un faux pas notable pour le candidat à la succession d'Angela Merkel.
Publié: 16.07.2021 à 15:56 heures
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Dernière mise à jour: 09.08.2021 à 06:04 heures
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Laschet dans l'émission "Current Affairs Hour" avec la présentatrice Susanne Wieseler: "On ne change pas de politique pour un seul jour comme cela"
Photo: Screenshot WDR
Fabienne Kinzelmann, Jocelyn Daloz (adaptation)

Les fortes pluies ont cessé, mais leurs conséquences sont dévastatrices. En Allemagne, des régions entières sont toujours inondées. Des dizaines de personnes sont portées disparues, et l'on compte au moins 80 morts. Ces inondations catastrophiques sont au centre des préoccupations du pays, comme des politiciens.

La chancelière Angela Merkel est même rentrée de Washington plus tôt que prévu – jeudi – coupant ainsi court à sa visite au président américain Joe Biden. Elle a assuré le soutien du gouvernement aux personnes touchées par les inondations: «Nous ne les laisserons pas seules en cette heure difficile et terrible, et nous les aiderons également pour la reconstruction.»

Cette reconstruction se fera toutefois sans elle. La chancelière n'est en effet pas candidate aux prochaines élections du Bundestag, qui auront lieu le 25 septembre prochain. Ainsi, une campagne électorale intense a lieu de l'autre côté du Rhin. Avec pour acteurs des figures polarisantes de la politique allemande, comme Armin Laschet (CDU). Ce dernier a déchaîné les passions sur Twitter suite à une interview donnée jeudi.

«On ne change pas de politique à cause d'un seul jour»

Lors de l'émission «Aktuelle Stunde», de la chaîne allemande WDR, le premier-ministre du Bundesland Rhénanie-du-Nord-Westphalie a fait preuve d'insensibilité vis-à-vis des victimes des inondations. Avant d'aggraver son cas en s'empressant de reprendre la journaliste sur un ton paternaliste – ajoutant ainsi une touche de sexisme à une boutade déjà notable. Le politicien a en effet rétorqué à Susanne Wieseler: «Excusez-moi, jeune femme («junge Frau» en allemand), mais on ne change pas de politique pour un seul jour comme cela.»

Armin Laschet faisait ici référence à la politique climatique, cherchant à minimiser le lien entre cette dernière et les catastrophes naturelles qui ravagent actuellement l'Ouest de l'Allemagne.

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Les internautes se demandent encore s'il a vraiment vexé la célèbre présentatrice Susanne Wieseler (52 ans) en la traitant de «jeune femme» avec condescendance, ou s'il a simplement oublié son nom et marmonné «Excusez-moi, Madame...».

Un candidat climatosceptique?

Mais la boutade paternaliste n'est peut-être pas la pire de Armin Laschet. En effet, le candidat à la chancellerie, dont le pays a perdu plusieurs dizaines de personnes à cause des conditions météorologiques extrêmes, semble chercher à amoindrir les impacts des inondations. Et pourtant, ces dernières pourraient continuer à affecter la vie de nombreuses personnes pendant des mois. Malgré cela, le candidat a déclaré qu'on «ne change pas de politique» à cause d'un seul «jour comme ça». Pourtant, quelques heures plus tôt, le politicien avait appelé à «accélérer la protection du climat» au vu des inondations.

«Armin Laschet est en train de devenir la caricature d'un politicien raté du XXIe siècle», a commenté sur Twitter la professeure suisse d'écologie Julia Steinberger, de l'Université de Lausanne. Selon l'académicienne, il fait passer l'industrie avant la protection du climat et réduit les effets de la crise climatique à «un jour» – en plus de faire preuve de condescendance envers son interlocutrice.

No comment

D'autres utilisateurs, en revanche, accusent le journaliste de «t-online» Patrick Diekmann, qui avait partagé la scène embarrassante, de chercher à influencer la campagne électorale. Diekmann se défend: «J'ai posté la vidéo de Laschet parce qu'il a dit que les catastrophes actuelles ne doivent rien changer à la politique climatique.» La «dynamique colérique» sur le réseau social l'a en revanche surpris, a-t-il déclaré. «Je cherchais plutôt à lancer le débat sur les faiblesses de la politique climatique allemande face à la catastrophe actuelle.»

Le parti-mère du politicien tente néanmoins de sauver ce qui peut encore l'être. «Personne ne peut douter que cette catastrophe est liée au changement climatique», a par exemple déclaré le ministre de l'Intérieur Horst Seehofer dans «Der Spiegel» vendredi matin – appelant également à «accélérer la protection du climat».

Le candidat à la chancellerie lui-même n'a pas encore commenté la scène de l'interview. Jeudi, il s'est cependant laissé accompagner par les caméras alors que, sans cravate mais chaussé de bottes en caoutchouc, il faisait le point sur la situation. «C'est une situation dramatique pour le peuple», a-t-il déclaré à Bild. Ajoutant aussi que toutes les aides possibles seront mises en place.

(kin)

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