«Tout est fini»
Piégés sur la route de la mort, les soldats ukrainiens fuient Koursk dans le chaos

Sous un feu nourri et traqués par des drones russes, les soldats ukrainiens tentent de battre en retraite de Koursk. La seule route menant à la frontière est devenue un piège mortel, faisant de chaque kilomètre une lutte pour la survie dans un chaos total.
Publié: 09:40 heures
Un soldat ukrainien pleure sur l'épaule de son camarade après son retour de la région de Koursk, le 14 août 2024.
Photo: Getty Images
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Solène MonneyJournaliste Blick

Des scènes dignes d’un «film d’horreur», un «repli catastrophique»: la situation à Koursk échappe au contrôle des forces ukrainiennes. Près de sept mois après leur incursion surprise en Russie, les soldats de Volodymyr Zelensky battent en retraite sous un feu nourri. Entre frappes d’artillerie et attaques incessantes de drones, leur repli vire au cauchemar.

Les premiers témoignages dévoilent une fuite chaotique, certains soldats étant contraints de rentrer à pied de nuit en Ukraine, rapporte la BBC lundi 18 mars. Si la suspension du partage de renseignements des Etats-Unis a accéléré la contre-offensive russe, ce serait surtout un point stratégique qui a scellé le sort de cette bataille: la route R200, seul lien entre l’Ukraine et son dernier point d’appui en territoire russe. Un point faible.

Depuis décembre, cette voie est une cible privilégiée des frappes russes. L’artillerie et les drones kamikazes transforment chaque convoi en cible facile, perturbant la rotation des troupes et brisant le moral des soldats. «La logistique ne fonctionne plus: les livraisons organisées d'armes, de munitions, de nourriture et d'eau ne sont plus possibles», lâche un soldat à la BBC. Et aujourd'hui même se replier devient le parcours du combattant.

Frôler la mort

Le 8 mars, un blogueur militaire ukrainien alertait déjà sur la situation: «La situation dans la région de Koursk est très difficile et pourrait tourner au désastre si nous n’agissons pas rapidement pour dégager les voies logistiques.» Trois jours plus tard, la route R200 était totalement envahie par les drones russes.

Pilotés à 19 kilomètres de distance, ces engins échappent aux brouilleurs ukrainiens et frappent sans relâche. Deux ou trois drones surgissent en une minute, rapporte un soldat ukrainien. «Nous avons frôlé la mort plusieurs fois. Il y a des drones dans le ciel en permanence.» Sur cette route infernale, blindés calcinés, cadavres et blessés bloquent la progression des troupes.

Un commandant a confié au «New York Times» que son unité a mis deux jours à parcourir seulement 19 kilomètres à pied pour regagner la frontière ukrainienne. Dans un message datant du 14 mars, un soldat lance à la BBC: «Tout est fini dans la région de Koursk... l'opération n'a pas réussi.»

La colère gronde

Sur le terrain, la frustration monte. Certains soldats accusent leurs supérieurs de ne pas avoir ordonné un repli plus tôt, quand la situation était plus sûre. Un soldat lâche même ne pas être sûr de la manière dont les commandants comptent évacuer la région, rapporte le «Telegraph». 

Derrière cette débâcle, la suspension du partage de renseignements américains a quand même pesé. Sans ces données, l’Ukraine ne peut plus frapper avec précision. Le retour des troupes nord-coréennes en janvier a également accru la pression sur les lignes ukrainiennes, fragilisant davantage la défense.

Un autre tournant de cette bataille serait l’infiltration russe par un gazoduc désaffecté. Alors que Kiev affirme avoir bombardé cet axe et infligé de lourdes pertes, cet épisode aurait tout de même précipité son repli.

La protection de Soumy

Si les soldats démentent être totalement encerclés, la menace d’un nouvel assaut pèse déjà sur Soumy, où les troupes ukrainiennes s’organisent. L’inquiétude gagne la population locale. «Les habitants ont peur, des drones sont abattus tous les jours», confie Liza Sherstyuk, une travailleuse humanitaire au «Telegraph».

Le repli de Koursk marque un tournant dans le conflit. Pour l’Ukraine, l’heure n’est plus à la contre-offensive, mais à la survie.

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