Ce n’est pas une rumeur, c’est une fuite et elle vient d'être quasi confirmée par une annonce du parlement européen. La venue à Bruxelles de Volodymyr Zelensky ce jeudi 9 février, après sa visite à Londres la veille, dominera l'agenda des 27, de leurs diplomates et des eurodéputés. «Une session plénière extraordinaire aura lieu jeudi 9 février 2023, à 10h. Le président de l'Ukraine, Volodymyr Zelensky, s'adressera à l'Assemblée au cours d'une séance solennelle», a appris Blick d'une source crédible.
Le président ukrainien retrouvera ensuite dans la capitale belge les chefs d’État ou de gouvernement de l’Union européenne, réunis pour un sommet extraordinaire de deux jours. Logique: ce sommet a prévu de discuter de l’aide à son pays, et de l’indispensable soutien militaire à l’armée ukrainienne, à quelques jours du premier anniversaire de l’agression russe, le 24 février.
Trois réussites d’un coup
À Bruxelles, le président ukrainien fera d’une pierre trois coups. Il démontrera d’abord au monde qu’il n’est pas prisonnier de la situation sécuritaire de son pays, alors que l’intensité des combats a fortement augmenté ces derniers jours et que la crainte d’une grande offensive russe est palpable. Il prouvera ensuite à ses partenaires européens qu’ils sont aussi importants à ses yeux que l’Amérique de Joe Biden, où il s’est rendu juste avant Noël pour une rencontre avec son homologue à la Maison-Blanche puis un discours au Congrès.
Volodymyr Zelensky profitera enfin de cette visite pour mettre une pression maximale sur les dirigeants européens au sujet de l’adhésion de son pays à l’UE. À Kiev, beaucoup rêvent d’un processus accéléré qui pourrait voir l’Ukraine intégrer l’Union dès 2026. Un rêve écarté par Paris et Berlin, mais que d’autres pays membres, comme la Pologne ou les Pays Baltes, se sont promis de concrétiser dès que possible.
La fuite sur la possible venue à Bruxelles de Zelensky est, semble-t-il, venue de l’entourage de la présidente du Parlement européen, Roberta Metsola. C’est en tout cas la version donnée par l’influent média en ligne Politico. «La nouvelle de la visite du président ukrainien aurait dû rester secrète jusqu’au dernier moment, pour des raisons de sécurité évidentes, écrit ce dernier. Mais elle a commencé à être ébruitée par des membres du cabinet de Roberta Metsola lors d’une réunion avec les présidents de groupes. Et, visiblement, tous les parlementaires n’avaient pas compris qu’il fallait rester discret…» Le porte-parole du Conseil européen (l’instance représentant les pays membres) a répondu que le leader ukrainien «dispose de toute façon d’une invitation permanente».
Outre son agenda, la question est: pourra-t-il venir?
L’une des questions posées porte sur l’agenda de l’homme fort de Kiev s’il s’invite au sommet européen extraordinaire. La logique voudrait qu’il s’exprime aussi devant les eurodéputés en séance plénière. Mais pour l’heure, une telle séance n’a pas été convoquée. Difficile aussi d’imaginer qu’il puisse venir à Bruxelles sans se rendre au siège de l’OTAN, cette Alliance atlantique qui le soutient à bout de bras contre Vladimir Poutine.
Viendra? Viendra pas? Sur le plan de la sécurité, tout est calé. Habituée à accueillir au moins quatre sommets européens par an, plus une quantité de rencontres au plus haut niveau, la capitale de l’UE est parée pour toute éventualité. La question n’est donc pas là. «C’est sa sortie de l’Ukraine qui peut poser le problème, puis son retour à Kiev», admet un diplomate. Lequel s’interroge aussi sur l’accord des 27 pour une telle visite.
«Il faut apprendre à dire aux Ukrainiens: patience!»
Comment refuser en effet de faire de nouvelles promesses à ce chef d’État d’un pays assiégé qui se bat pour l’Europe? Qui aura le courage de lui dire publiquement ce que l’entourage d’Emmanuel Macron, à l’Élysée, répète lors de rencontres avec la presse. «L’octroi du statut de candidat à l’Ukraine et à la Moldavie, le 27 juin, était un miracle, témoigne une diplomate. Maintenant, à part les Polonais, personne ne veut accélérer le calendrier. Il faut apprendre à dire aux Ukrainiens: patience! Mais c’est dur, vu le niveau des sacrifices qu’ils consentent sur le champ de bataille.»
S’il vient à Bruxelles ce jeudi, Volodymyr Zelensky sera en tout cas dans une position idéale pour défier publiquement Vladimir Poutine. La photo, aux côtés des 27, sera très parlante. Même le Hongrois Viktor Orban, qui revendique de conserver des liens avec la Russie (tout en appliquant les sanctions), devra sans doute obtempérer. Le sommet UE-Ukraine de Kiev le 3 février, et la venue de quinze commissaires européens auront servi de tremplin. C’est à Bruxelles que le président ukrainien devra, de toute façon, concrétiser un jour ou l’autre son grand bond en avant européen.