Alliance atlantique, valeurs de l'UE ou encore sanctions contre Moscou, Giorgia Meloni a signalé son intention de collaborer au monde occidental dès le début de sa campagne électorale. Le président français Emmanuel Macron espérait en particulier de bonnes relations bilatérales avec la première cheffe de gouvernement italienne. Mais trois semaines seulement après son entrée en fonction, Giorgia Meloni confronte ses voisins à un casse-tête diplomatique. Au cœur des frictions, la politique de Rome envers les réfugiés.
France et Italie veulent en outre que l'UE plafonne les prix du gaz et qu'elle accorde des milliards de crédits supplémentaires pour leur permettre de lutter contre la crise énergétique et économique. Ce nouveau paquet d'aide est demandé par certains États, mais il est refusé par l'Allemagne. Emmanuel Macron a donc misé sur un rapprochement stratégique avec l'Italie aussi dans cette optique. Ce n'est pas un hasard si le président français a été le premier chef d'État étranger à rendre visite à la Première ministre fraîchement nommée à Rome.
Des bateaux de réfugiés contrecarrent les plans de Macron
Il aura fallu que quatre bateaux de sauvetage, avec à leur bord des migrants, se pointent en Italie. Le monde entier, Emmanuel Macron en tête, a ainsi pu se rappeler qui est réellement Giorgia Meloni: une dirigeante d'extrême droite, cheffe d'une coalition populiste.
Car le nouveau gouvernement ferme les ports aux bateaux de sauvetage. Motif invoqué: la plupart des personnes à bord ne sont pas des personnes persécutées, mais des immigrants. Après des protestations dans toute l'Europe, trois des bateaux ont finalement été autorisés à accoster «pour des raisons humanitaires». L'Ocean Viking, de l'organisation SOS Méditerranée, a cependant été renvoyé. Le navire, avec 234 personnes sauvées en mer à bord, s'est alors dirigé vers la France. Il a été autorisé à accoster au port de Toulon ce vendredi 11 novembre. Les réfugiés devraient être dirigés vers la France, l'Allemagne et d'autres pays de l'UE.
Une lettre de remerciement provoque un tollé
Dans une lettre publique, Rome a remercié «la décision de la France de participer à la responsabilité de la détresse des réfugiés, que l'Italie et quelques autres pays méditerranéens doivent jusqu'à présent assumer seuls».
Cela n'a pas manqué de faire gronder Paris. L'accueil de l'Ocean Viking dans le port français n'est qu'une geste unique, non voué à devenir systématique, a aussitôt souligné le ministre français de l'Intérieur Gérald Darmanin. L'attidude de l'Italie est également vivement critiquée.
En juin dernier, un pacte de solidarité avait été conclu lors d'un sommet de l'UE, prévoyant une répartition des réfugiés entre les pays membres sur une base volontaire. La France et l'Allemagne souhaitaient accueillir chacune 3500 réfugiés des côtes italiennes cette année encore.
Mais c'est désormais terminé, a estimé Gérald Darmanin. Le ministre de l'Intérieur demande que l'Allemagne et les autres États de l'UE mettent aussi un terme à ce mécanisme. Le Français a en outre demandé l'envoi de 500 policiers aux dix postes-frontières avec l'Italie, afin d'empêcher toute entrée de réfugiés dans l'Hexagone.
La question migratoire, un enjeu pour Macron
Mais pourquoi une telle agitation? Lors des élections législatives de juin 2022, le président Emmanuel Macron a perdu la majorité absolue. Il doit maintenant composer avec une forte opposition populiste de droite, le Rassemblement national de Marine Le Pen. La gestion des réfugiés est donc un exercice d'équilibriste primordial aussi pour le président français.
Quant à Giorgia Meloni, ce coup d'éclat arrive au mauvais moment. L'Italie doit faire face aux séquelles de la pandémie. Elle est fortement endettée et a besoin de toute urgence de nouvelles injections financières de l'UE. Malgré tout, le nouveau gouvernement reste ferme sur la question des réfugiés. Le ministre de l'Intérieur Matteo Piantedosi demande que l'accueil des réfugiés soit réparti en fonction du pavillon des bateaux qui leur viennent en aide en mer. Il est aussi envisagé de confisquer les navires des ONG qui accostent en Italie et d'inculper leurs capitaines.