Poutine veut ses propres Jeux olympiques d'été
«La Russie se comporte comme un enfant gâté!»

Les athlètes russes sont toujours en grande partie exclus des manifestations sportives internationales. La Russie envisage de créer sa propre compétition. Mais ce plan pourrait ne pas fonctionner.
Publié: 18.05.2023 à 20:15 heures
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En Russie, celui qui remporte l'or olympique devient un héros populaire. C'est le cas de l'as de natation Evgeni Rylov.
Photo: Instagram / Jewgeni Rylow
Nina Köpfer

Les athlètes russes pourront-ils participer aux prochains Jeux olympiques de Paris? Les avis sont partagés. Le Comité international olympique (CIO) a plaidé pour une réintégration des athlètes russes, à condition qu’ils remplissent certains critères. Les sportifs doivent par exemple apporter la preuve qu’ils ne soutiennent pas activement la guerre.

Mais cette concession de la part du CIO suscite des critiques à l’international. Du côté russe, on râle également. Mais pour d'autres raisons. Le chef du Comité olympique russe, Stanislav Pozdniakov, se montre particulièrement mécontent. Presque aucun athlète russe n’est en mesure de satisfaire aux exigences du CIO, a-t-il écrit sur son canal Telegram.

La Russie a-t-elle vraiment besoin des Jeux olympiques?

Moscou a donc décidé de prendre les choses en main. La Russie veut mettre sur pied ses propres Jeux. Les deux pays les plus peuplés du monde, la Chine et l’Inde, devraient notamment y participer. Ils font partie, avec la Russie, le Brésil et l’Afrique du Sud, des pays du BRICS, un groupe de cinq économies émergentes. Il s’agit peu ou prou d’un équivalent au G7 des pays occidentaux.

Que se passera-t-il si ces Jeux ont effectivement lieu dans le pays de Vladimir Poutine? Et la Russie a-t-elle encore réellement besoin des Jeux olympiques?

Le spécialiste de la Russie Sven Daniel Wolfe est catégorique. «Oui, absolument, tranche ce géographe politique à l’université de Zurich. La Russie fait certes semblant de ne pas avoir besoin de cette compétition et de ne pas dépendre de la bonne volonté du CIO.

Mais en réalité, ce sera une catastrophe pour le gouvernement si le pays reste exclu de cette manifestation.» Pourquoi? Car depuis longtemps, la Russie utilise les événements sportifs internationaux pour démontrer sa puissance et sa force. Pas seulement vis-à-vis des autres États. Mais aussi vis-à-vis de sa propre population, assure l’expert.

Le sport comme arme de propagande

La qualité de vie ne s’est pas améliorée depuis l’arrivée de Vladimir Poutine au pouvoir il y a 23 ans. Beaucoup vivent dans une extrême pauvreté. Avec les succès sportifs, le gouvernement est en mesure de montrer au peuple à quel point la nation est prospère et forte. Il s'agirait donc principalement d'une question d'image. «Car la plupart des Russes ne ressentent rien de la puissance ni de l’argent de la Russie dans leur dur quotidien», poursuit Sven Daniel Wolfe.

Mais l'idée d’un univers olympique russe parallèle est une pure folie, estime le connaisseur de ce grand pays. Car ce qui est intéressant avec les Jeux olympiques est que le monde entier les regarde. Ainsi, plus le public est important, plus l’impact est grand. «La Russie pourrait par conséquent bel et bien organiser son propre événement avec la Chine et l’Inde. Mais cela n’intéressera personne», assène le géographe politique.

«Ne pas céder maintenant»

Pour les sportifs russes aussi, ces Jeux seraient insatisfaisants, comparé à Paris 2024. Sven Daniel Wolfe peut comprendre la frustration des athlètes. Pour la plupart d’entre eux, le programme de promotion du sport mis en place par l’État russe rend inévitable une certaine proximité avec le régime. Faut-il donc vraiment punir ces athlètes innocents?

Absolument pas, répond fermement Sven Daniel Wolfe, qui compare la Russie à un bébé. «Ce pays se comporte comme un enfant gâté qui n’a plus de bonbons, gifle-t-il. Alors il crie, et crie encore. Jusqu’à ce que quelqu’un craque et lui cède un morceau de gâteau!»

Il s’agit dès lors de rester ferme, poursuit-il. Pour Sven Daniel Wolfe, il n’y a qu’une seule façon de permettre à nouveau aux sportifs russes de montrer leurs talents sur le plan international. La Russie doit mettre fin à la guerre. Tout simplement.

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