Malgré le retrait de Wagner
Voici pourquoi le trône de Vladimir Poutine vacille

Après des heures de négociations, le chef d'Etat biélorusse Alexandre Loukachenko a réussi samedi à dissuader Evgueni Prigojine d'avancer vers Moscou. Un coup d'Etat militaire a été évité – mais le pouvoir de Vladimir Poutine s'effrite.
Publié: 26.06.2023 à 11:05 heures
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Dernière mise à jour: 26.06.2023 à 13:38 heures
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Le président russe Vladimir Poutine s'était exprimé lors de son allocution télévisée sur la menace d'un coup d'Etat militaire. Il avait alors promis des sanctions sévères pour les traîtres. Il a dû faire marche arrière par la suite.
Photo: keystone-sda.ch
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Myrte Müller

Durant les 20 ans de son règne, Vladimir Poutine est resté tout-puissant et sans peur, impitoyable et brutal envers ses adversaires politiques, autoritaire même avec l'élite financière russe. Suréquipé sur le plan militaire, le tsar moderne a longtemps été craint dans le monde entier. Cette force a toujours légitimé la permanence du règne du président.

Pourtant, depuis le week-end dernier, la stabilité du chef du Kremlin vacille, ébranlée par la rébellion armée d'un groupe de mercenaires qui menace ouvertement de lancer un coup d'Etat militaire. Mais au lieu de réprimer la révolte par la force, Vladimir Poutine laisse Evgueni Prigojine et son groupe s'emparer presque sans résistance du principal quartier général militaire de l'armée russe dans le sud du pays, et marcher jusqu'à 200 kilomètres de Moscou. Les observateurs n'en croient pas leurs yeux.

Prigojine autorisé à s'exiler sans poursuites judiciaires

Dans une allocution télévisée samedi soir, Vladimir Poutine compare l'avancée de la milice privée à la révolution de 1917. Il qualifie les rebelles de traîtres et annonce des sanctions sévères. Mais il laisse ensuite un dirigeant étranger, le président biélorusse Alexandre Loukachenko, rappeler à l'ordre le chef rebelle de Wagner, et finit par reculer publiquement. Evgueni Prigojine peut s'exiler en Biélorussie – sans être poursuivi. Ses mercenaires non plus ne sont pas menacés de procès, selon la promesse de Vladimir Poutine. Et cela en Russie, où la moindre protestation, même silencieuse, est habituellement réprimée.

Pourquoi l'armée et la garde nationale n'ont-elles pas stoppé l'avancée des rebelles? Existe-t-il des alliances secrètes entre les unités militaires et le groupe Wagner? L'empire de Poutine est-il vraiment en train de lui échapper? Ou, comme certains sceptiques commencent à le penser, le chef de Wagner n'est-il rien de plus qu'une marionnette du chef du Kremlin et la tentative de putsch a-t-elle été orchestrée depuis les plus hautes sphères du pouvoir? Poursuivons la réflexion: La menace d'un putsch met-elle alors la Russie en «danger», au point de justifier la loi martiale et donc une mobilisation militaire?

«Poutine va faire tuer Prigojine en Biélorussie»

Pour la plupart des observateurs internationaux, les atermoiements du président russe sont un signe clair de perte de contrôle. Dans sa dernière analyse, l'Institute for the Study of War (ISW) reconnaît des faiblesses évidentes dans la sécurité interne. Le conseiller du président ukrainien, Mykhaïlo Podoliak, a déclaré dans une interview à «La Repubblica» voir dans la révolte de Wagner «le début de la fin de Poutine» et les possibilités que les forces armées russes rejoignent les mercenaires.

Depuis des mois, Evgueni Prigojine fulmine librement contre la conduite de la guerre russe et accuse sans crainte l'élite militaire d'incompétence, car Vladimir Poutine le laisse faire. Il n'est ni rappelé à l'ordre, ni arrêté, ni même assassiné. Pourquoi ce dernier hésite-t-il lorsqu'il s'agit de Evgueni Prigojine? A-t-il sous-estimé le pouvoir du chef rebelle? Ou bien les mercenaires combatifs de Wagner sont-ils importants pour lui sur le plan militaire?

Le monstre que le chef du Kremlin a autrefois créé le pousse désormais dans ses retranchements. Vladimir Poutine ne pardonne jamais à ses traîtres, et Evgueni Prigojine est dorénavant l'un d'entre eux, Jill Dougherty en est convaincue. «Il est fort possible que Prigojine soit tué en exil», affirme l'ancienne directrice du bureau de CNN à Moscou.

La crise actuelle va attiser les soupçons du dirigeant russe et le rendre encore plus dangereux et imprévisible – pour ses adversaires ou pour tous ceux qu'il considère comme ses ennemis. Cette tentative de révolte s'inscrit dans la lignée des nombreuses défaites militaires et politiques que Vladimir Poutine a dû essuyer depuis le début de la guerre en Ukraine. Le président a désespérément besoin d'un succès, surtout militaire. Cela le rend également encore plus dangereux pour l'Ukraine.

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