Une fois de plus, Donald Trump a obtenu ce que personne n'avait réussi avant lui. Le républicain est le premier président américain à être déclaré coupable et condamné par un tribunal.
Trump s'est exprimé par appel vidéo depuis la Floride lors de l'annonce de la peine vendredi concernant son procès dans l'affaire Stormy Daniels. En 2024, un jury l'avait reconnu coupable de 34 chefs d'accusation pour de faux décomptes avec lesquels le républicain aurait voulu dissimuler ses paiements illégaux à l'actrice porno.
La peine prononcée est légère: «libération inconditionnelle» (unconditional release). Donald Trump est donc officiellement un délinquant, mais il ne doit pas payer d'amende ni aller en prison. Mais ce que le juge Juan Merchan a décidé pour le futur président pourrait lui faire beaucoup plus mal qu'une amende salée.
Que signifie le jugement de «libération inconditionnelle»?
La loi de l'Etat de New York permet à ses tribunaux de remettre en liberté sans peine les personnes reconnues coupables, à condition qu'une peine «n'ait pas vraiment de sens». Mais l'affaire laisse une trace. Donald Trump est condamné et a un casier judiciaire, même s'il n'a pas de peine réelle à purger.
Théoriquement, le juge aurait pu condamner Trump à une peine allant jusqu'à quatre ans de prison ou à une amende allant jusqu'à 5000 dollars par chef d'accusation (soit 170'000 dollars au total). Une peine avec sursis aurait également été possible. Toutefois, il aurait été impossible, dans les faits, d'arrêter et d'emprisonner un président américain qui ne respecterait pas les conditions de sa mise à l'épreuve.
Quelles sont les autres effets de sa condamnation?
En tant que criminel condamné, Trump est soumis à certaines restrictions. Il n'a plus le droit de posséder une arme à feu (au moins dans l'Etat de New York) ni d'accepter une fonction au niveau de l'Etat (cela ne devrait pas lui poser de problème).
Les éventuelles restrictions de voyage sont un peu plus délicates. Le magazine «Forbes» constate que divers pays – dont le Canada, l'Australie, la Chine, le Japon et le Royaume-Uni – imposent des restrictions d'entrée aux personnes ayant un casier judiciaire. Il reste toutefois improbable que ces pays refusent l'entrée au futur président.
Trump peut-il se gracier et éviter les conséquences?
Non. Les présidents américains ont certes des compétences étendues en matière de grâce. C'est ce qu'a montré récemment l'actuel président Joe Biden, qui a gracié son fils Hunter et lui a évité une très probable peine de prison pour des délits fiscaux et la possession d'armes non autorisée.
Ces «pardons» ne s'appliquent toutefois qu'aux procédures et aux jugements rendus par un tribunal national. Mais comme le procès a été jugé au niveau de l'Etat de New York, Trump ne pourra pas se gracier – merci au fédéralisme américain.
Comment Trump réagit-il au jugement?
Il s'est indigné. Sur son réseau social Truth Social, il a qualifié l'ensemble du procès de «chasse aux sorcières» et a annoncé qu'il allait porter l'affaire devant la justice. Le «vrai jury» est de toute façon le peuple américain. Et celui-ci lui aurait donné un «pouvoir écrasant» lors des élections. Quelques minutes avant l'annonce du verdict, Trump a déclaré au tribunal: «Je suis totalement innocent. Je n'ai rien fait de mal.»
Mais Trump devrait être satisfait. S'il avait été reconnu coupable dans tous ses procès et avait écopé à chaque fois la peine maximale, il aurait été emprisonné pendant 717 ans et aurait dû payer des amendes d'un montant de plus de 11 millions de dollars, comme l'a calculé «Forbes». Au vu de cette situation initiale, une «libération inconditionnelle» semble s'apparenter à un gros lot à la loterie.
Que nous révèle ce jugement sur l'état de la justice?
La Cour suprême américaine aurait eu la possibilité d'empêcher le prononcé de la peine de vendredi après-midi. Trump l'a explicitement demandé à la cour. Mais les nouveaux juges (dont trois ont été nommés par Trump en personne) se sont prononcés à une courte majorité (cinq contre quatre) contre le républicain.
Cela montre que l'autorité judiciaire suprême fonctionne de manière indépendante malgré la nette supériorité des conservateurs (six des neuf juges ont été nommés par des présidents républicains). Ils ne sont pas à la botte du futur président et accordent plus d'importance à la loi qu'aux souhaits personnels de Trump.
Ce que le juge new-yorkais Juan Merchan a donné comme leçon est mémorable. «La protection légale dont bénéficie le président des Etats-Unis est si extraordinairement forte en raison de la fonction en elle-même, et non de la personne qui occupe cette fonction», a déclaré le juge. Une pique contre Trump. Elle devrait être davantage douloureuse que l'amende que le tribunal aurait pu infliger au futur président.