Vladimir Poutine a sa propre vision des choses, et il l'a prouvé une nouvelle fois ce mardi dans un message vidéo. Selon ses propres mots, le chef du Kremlin voit la Russie comme une «grande puissance» sur la scène mondiale.
«Nous sommes devenus plus forts», a-t-il déclaré dans une vidéo d'une vingtaine de minutes. Il s'exprimait à l'occasion de la réunion du soi-disant concile mondial du peuple russe, une organisation placée sous l'égide de l'Eglise orthodoxe russe. La Russie moderne a retrouvé et consolidé «sa souveraineté en tant que puissance mondiale».
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Poutine évoque l'unité russe
Est-ce que la Russie est vraiment devenue plus forte après presque deux ans d'une guerre peu fructueuse? Les doutes planent. L'économie russe a même réellement souffert de l'expansionnisme de Poutine. Ulrich Schmid, spécialiste de la Russie à l'université de Saint-Gall, met en perspective pour Blick ce soudain excès de mégalomanie.
Ulrich Schmid trouve étonnant que Poutine, contrairement au chef de l'Eglise Kirill Ier par exemple, ne se soit pas présenté sur place, mais se soit contenté d'intervenir par vidéo. «Un symbole de la distance entre le président et la société russe», analyse le spécialiste de l'Europe de l'Est. Cette distance, Poutine a tenté, tant bien que mal, de la réduire dans son allocution.
Pour ce faire, il a évoqué l'unité russe. «Il a explicitement mentionné les peuples non russes au sein de la fédération. D'ailleurs, dans leurs républiques, on a largement recruté pour la guerre», poursuit l'expert.
Poutine a une fois de plus reproché à l'Occident de vouloir semer la misère et le chaos en Russie par une volonté de domination, afin de provoquer la désintégration du plus grand pays du monde par sa superficie. Il l'assure, de telles tentatives sont vouées à l'échec. «La désintégration de la Russie est une peur très personnelle de Poutine et c'est pourquoi elle constitue un grand thème dans le texte du discours», affirme Ulrich Schmid.
L'Ukraine ou la «Nouvelle Russie»
Poutine a salué comme un succès l'annexion de territoires ukrainiens par la Russie, condamnée par la communauté internationale comme une violation du droit international, et l'a intégrée dans son discours sur l'unité russe. Selon Ulrich Schmid, le mot «Ukraine» n'a pas été prononcé dans le discours de Poutine, qui a préféré parler de «Nouvelle Russie».
«La justification de la guerre a changé. Il n'était plus question des objectifs initiaux de la guerre, à savoir dénazifier l'Ukraine», remarque Ulrich Schmid, qui ajoute: «Dans le message vidéo, Poutine a essentiellement répété les lignes principales de la propagande russe.» Au passage, Poutine a également misé, selon l'expert, sur sa «stratégie d'inversion rhétorique classique». En d'autres termes: une offensive verbale totale contre l'Occident.
Poutine a qualifié l'Occident d'isolé sur le plan international. Ulrich Schmid considère en revanche que c'est davantage «l'empire du tsar» qui est isolé sur la scène internationale, ce qui suscite le mécontentement de l'élite russe. Elle se retrouve obligée de se tourner vers la Corée du Nord et l'Iran, la Russie ayant affaibli sa position vis-à-vis de la Chine. «Les alliances internationales de la Russie sont opportunistes et ne fondent pas une communauté de valeurs comme à l'Ouest», résume Ulrich Schmid.