Nouvel épisode des tensions entre Pékin et Manille en mer de Chine méridionale: des garde-côtes chinois ont débarqué mi-avril sur un îlot disputé situé à proximité d'un avant-poste militaire philippin, affirme un média d'Etat. Cette annonce, faite samedi, intervient au moment où Manille et Washington mènent d'importants exercices militaires conjoints dans la région, destinés notamment à afficher leur unité contre l'influence chinoise.
Au nom de raisons historiques, la Chine revendique la quasi-totalité des îlots de la mer de Chine méridionale. Elle conteste notamment la décision d'une cour d'arbitrage internationale selon laquelle ses revendications n'ont aucune base juridique. D'autres nations (notamment les Philippines et le Vietnam) ont des prétentions rivales, qui se chevauchent parfois, et contrôlent plusieurs îlots de cette vaste zone maritime. A la mi-avril, les garde-côtes chinois ont «mis en place un contrôle maritime» sur l'îlot de Tiexian, également connu sous son nom anglais de Sandy Cay, a annoncé samedi la télévision étatique CCTV.
Ce petit îlot fait partie de l'archipel des Spratleys. Il est situé à quelques kilomètres de Thitu – la plus grande île contrôlée par les Philippines dans la région –, où des gardes-côtes et des militaires philippins sont stationnés. Les garde-côtes chinois ont débarqué sur Tiexian pour y «exercer la souveraineté et la juridiction» de Pékin, y mener une «inspection» ainsi que pour «recueillir des preuves vidéo attestant des agissements illicites des Philippines», a expliqué CCTV.
«Epaule contre épaule»
La chaîne a diffusé des images de quatre garde-côtes posant avec un drapeau chinois sur l'îlot. Ils ont également «enlevé des bouteilles en plastique, bâtons de bois et autres débris ou déchets abandonnés» sur Tiexian, a précisé CCTV. Selon le journal britannique «The Financial Times», qui cite un responsable philippin anonyme, les garde-côtes chinois ont quitté les lieux après avoir déployé leur drapeau. Aucun signe ne prouve que la Chine occupe Tiexian de manière permanente ou y ait construit une structure.
Les autorités philippines n'ont pas encore réagi officiellement à cette initiative chinoise. Ces derniers mois, Pékin et Manille se sont mutuellement accusés d'être responsables d'une dégradation de l'environnement marin, notamment des coraux, au niveau d'îlots disputés. Le ministère chinois des Ressources naturelles a publié cette semaine une étude qui, selon l'agence de presse officielle Chine nouvelle, «invalide» les accusations philippines selon lesquelles des projets chinois de remblaiement autour des îlots porteraient atteinte à l'environnement.
Les forces armées philippines et américaines ont entamé, le 21 avril, trois semaines d'exercices annuels conjoints nommés «Balikatan» ("épaule contre épaule» en tagalog), destinées notamment à faire front commun contre la Chine dans la région. Quelque 17'000 personnes sont mobilisées pour ces exercices cette année qui simuleront un «scénario de bataille à grande échelle».
Les Américains aussi présents
Ces manœuvres militaires montrent «non seulement notre volonté de respecter notre traité de défense mutuelle en vigueur depuis 1951, mais aussi notre capacité inégalée à le faire», a déclaré le général des Marines américains James Glynn lors d'une cérémonie d'ouverture à Manille. «Rien ne permet de tisser des liens plus rapidement que l'adversité partagée», a-t-il ajouté, sans préciser à quelle menace commune il faisait référence.
Des journalistes de l'AFP ont pu assister dimanche dans la province côtière de Zambales, au nord de la capitale Manille, à une démonstration du nouveau système de défense aérienne américain à courte portée MADIS, destiné à améliorer la défense côtière de l'archipel. Des navires de guerre chinois ont été repérés dans les eaux proches des Philippines depuis le début des exercices la semaine dernière.
Le 22 avril, le porte-avions chinois Shandong «a été détecté en train de faire route à 2,23 milles nautiques (environ quatre kilomètres) au sud-ouest» de l'île Babuyan, à l'extrême nord des Philippines, a souligné la marine. Trois autres navires ont été repérés samedi à environ 60 kilomètres de Zambales, a ajouté la marine philippine dimanche. Pékin a dénoncé les manoeuvres conjointes, estimant qu'elles «sapent la stabilité» régionale et a accusé Manille de «collusion avec des pays extérieurs à la région».