«L'accord est adopté», a déclaré la présidente de la conférence, Rena Lee, sous les applaudissements, après l'adoption du texte par consensus, à New York. «L'océan est la force vitale de notre planète. Aujourd'hui, vous avez insufflé une nouvelle vie et un nouvel espoir pour que l'océan ait une chance de se battre», a commenté le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres, saluant une «réussite historique».
Malgré l'adoption du traité, la Russie a pris ses «distances» avec le consensus, qualifiant certains éléments du texte «totalement inacceptables».
Quinze ans de discussions
En mars, après plus de quinze années de discussions, dont quatre années de négociations formelles, les États membres avaient enfin réussi à se mettre d'accord, à l'issue de deux nouvelles semaines de négociations marathon, troisième «dernière» session en un an.
Le texte, alors gelé sur le fond, a depuis été passé au crible des services juridiques et traduit pour être disponible dans les six langues officielles de l'ONU.
Alors que les écosystèmes marins sont menacés par le changement climatique, les pollutions et la surpêche, la science a prouvé l'importance de protéger tout entier cet océan foisonnant d'une biodiversité souvent microscopique, qui fournit la moitié de l'oxygène que nous respirons et limite le réchauffement en absorbant une partie importante du CO2 émis par les activités humaines.
La haute mer commence où s'arrêtent les zones économiques exclusives (ZEE) des Etats, à maximum 200 milles nautiques (370 km) des côtes, et n'est donc sous la juridiction d'aucun État.
Même si elle représente près de la moitié de la planète et plus de 60% des océans, elle a longtemps été ignorée dans le combat environnemental, au profit des zones côtières et de quelques espèces emblématiques.
Outil phare du nouveau traité: la création d'aires marines protégées dans ces eaux internationales.
«Continuons sur cette lancée»
Aujourd'hui, environ 1% seulement de la haute mer fait l'objet de mesures de conservation. Mais en décembre à Montréal, l'ensemble des États de la planète s'est engagé à protéger, d'ici à 2030, 30% des terres et des océans de la planète.
Avec l'adoption, «la course pour la ratification commence et l'objectif de protéger au moins 30% des océans d'ici à 2030 reste à notre portée», a commenté Chris Thorne, de Greenpeace.
Le nouveau traité sur «la conservation et l'utilisation durable de la diversité biologique marine des zones ne relevant pas de la juridiction nationale» introduit également l'obligation de réaliser des études d'impact sur l'environnement des activités envisagées en haute mer.
Le texte n'en dresse pas de liste, mais cela pourrait aller de la pêche au transport, en passant par de potentielles activités controversées comme l'exploitation minière sous-marine ou la géo-ingénierie visant à limiter le réchauffement.
Le traité établit également le principe du partage des bénéfices des ressources marines génétiques collectées en haute mer, qui a cristallisé les tensions jusqu'à la dernière minute en mars.
Les pays en développement, qui n'ont pas les moyens de financer de très coûteuses expéditions et recherches, ont obtenu le principe d'un partage «équitable» des ressources marines génétiques, que ce soit l'accès aux données scientifiques ou une part des bénéfices anticipés de la commercialisation de ces ressources – qui n'appartiennent à personne – dont entreprises pharmaceutiques ou cosmétiques espèrent tirer des molécules miracles.
Signatures dès le 20 septembre
Le texte sera ouvert aux signatures le 20 septembre, au moment où des dizaines de chefs d'État et de gouvernement seront à New York pour l'Assemblée générale de l'ONU. Reste à savoir combien de pays décideront de monter à bord.
Les ONG estiment que le seuil de 60 ratifications pour entrer en vigueur ne devrait pas être trop difficile à atteindre, la Coalition pour une haute ambition de ce traité (menée par l'UE) comptant déjà une cinquantaine de pays, dont le Japon, le Chili, l'Inde ou le Mexique.
Mais 60 est loin de l'universalité prônée par les défenseurs de l'océan, qui espèrent que l'élan politique autour de l'adoption ne retombera pas. «Continuons sur cette lancée», a plaidé lundi le président de l'Assemblée générale de l'ONU, Csaba Körösi, saluant un «accord qui fait date»: «Continuons à travailler pour protéger nos océans, notre planète, et toutes les populations qui y vivent.»
(ATS)