Cette feuille de route, intitulée «Fermer le robinet», est publiée par le Programme des Nations unies pour l'environnement (PNUE) deux semaines avant la deuxième étape prévue à Paris, des négociations qui doivent aboutir à un traité international juridiquement contraignant d'ici fin 2024.
«Les plastiques jouent un rôle positif dans la société à bien des égards», écrit Inger Andersen, directrice exécutive du PNUE. «Il y a cependant un revers à la médaille: la façon dont nous produisons, utilisons et éliminons les plastiques, polluent les écosystèmes, menace la santé humaine et animale et déstabilise le climat.»
«Eliminer les plastiques problématiques»
En 2019, 353 millions de tonnes de déchets plastiques ont été produites dans le monde, dont 22% ont été abandonné dans des décharges sauvages, brûlé à ciel ouvert ou rejeté dans la nature. Le rapport préconise donc «en premier lieu d'éliminer les plastiques problématiques et inutiles», notamment en «réduisant de moitié la production de plastiques à usage unique».
Mais au-delà de cette catégorie éphémère, le PNUE n'évoque pas directement d'objectif de réduction, à la source, de la production de tous les plastiques alors que celle-ci pourrait doubler d'ici à 2040. Des recherches estiment qu'à cette date le plastique pourrait émettre 19% des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
En revanche, le PNUE met en exergue un objectif de réduction de la pollution, prévoyant 408 millions de tonnes de déchets à gérer en 2040, si le modèle économique actuel se poursuivait. Ce qui se traduirait par 227 millions de tonnes de plastiques abandonnées dans l'environnement.
Océan Pacifique: Le continent de plastique fait quelques heureux
«Trois mutations du marché»
Pour l'éviter, le programme onusien presse la communauté internationale d'adopter un «scénario de changement systémique», fondé sur «trois mutations du marché: réutiliser, recycler, diversifier». Une telle révolution, affirme le rapport, pourrait réduire ces déchets abandonnés de 80% à 41 millions de tonnes, en 2040.
«Promouvoir la réutilisation, la vente en vrac, les systèmes de consigne, de reprise des emballages, peut permettre de réduire de 30% (cette) pollution plastique», estime le rapport. «Une réduction supplémentaire de 20% peut être atteinte si le recyclage devient plus stable et rentable», notamment en «supprimant les subventions des énergies fossiles» qui rendent les plastiques neufs, trop bon marché.
«Diminution de 17%»
«Le remplacement des emballages, des sachets et des plats à emporter par des matériaux alternatifs (papier ou compostables) peut ajouter une diminution de 17%», note aussi le rapport qui s'est fondé sur les calculs du Pew Charitable Trusts et du cabinet Systemiq. «Même avec ces mesures, 100 millions de tonnes de plastiques à usage unique et à courte durée de vie devront encore être traitées, chaque année, d'ici 2040, sans compter l'héritage considérable de la pollution plastique existante».
Cette transition ferait économiser 4,5 milliards de dollars (4 milliards de francs suisses), estime le PNUE, qui prévoit la création de 700'000 emplois pour y parvenir, principalement dans les pays pauvres. Pour Hirotaka Koite, responsable de Greenpeace joint par l'AFP, «le rapport est très en deçà des ambitions nécessaires», car «il ne parle pas de réduction de la production globale».
Avant même de parler de «réutilisation», les conclusions «sous-estiment nettement le rôle que la réduction de +l'utilisation+ peut jouer» et accordent «trop de crédit au recyclage chimique». «Ils ont essayé de changer un tuyau, de remplacer les vannes, mais ils n'essaient pas vraiment de fermer le robinet», regrette Hirotaka Koite. Il salue toutefois la prise en compte de l'ensemble du cycle de vie pour évaluer les alternatives, les avertissements contre l'écoblanchiment des plastiques faussement «dégradables ou compostables», et la suppression des subventions.
(ATS)