Le robot conversationnel chinois, qui a fait irruption le mois dernier, a stupéfié par sa capacité à égaler ses concurrents américains pour un coût moindre, et suscité l'inquiétude de gouvernements alors que l'application s'est hissée en tête des téléchargements sur l'App Store.
Le 31 janvier, le régulateur sud-coréen chargé de la protection des données personnelles avait annoncé avoir demandé des explications à DeepSeek concernant son traitement des informations fournies par les utilisateurs, à l'instar d'autres pays dont la France et l'Irlande.
«Les mesures de blocage de DeepSeek ont été mises en oeuvre spécifiquement pour les PC militaires connectés à Internet», a précisé le ministère de la Défense à l'AFP, soulignant avoir «rappelé les consignes de sécurité concernant l'utilisation de l'IA générative pour chaque unité et chaque soldat».
Rivalité croissante entre les Etats-Unis et la Chine
Un autre ministère, celui du Commerce, a indiqué que l'accès à DeepSeek avait également été restreint, de manière provisoire, sur tous les ordinateurs de son administration. «Nous avons temporairement bloqué DeepSeek car il n'a pas répondu à l'enquête de la Commission de protection des informations personnelles», a déclaré à l'AFP un responsable du ministère du Commerce. Le ministère des Finances a également fait part à l'AFP de la «mise en oeuvre de mesures visant à interdire la fuite d'informations personnelles et confidentielles vers DeepSeek» pour tous ses fonctionnaires.
Kim Jong-hwa, professeur au département d'intelligence artificielle de l'université Cheju Halla de Jeju (sud), a confié qu'au vu de la rivalité croissante entre les Etats-Unis et la Chine, il soupçonnait des «facteurs politiques» d'être à l'origine de cette réaction. Le chercheur a expliqué à l'AFP que «d'un point de vue technique, les modèles d'IA comme ChatGPT sont également confrontés à de nombreux problèmes de sécurité qui n'ont pas encore été entièrement résolus».
Mais «comme nous ne pouvons pas actuellement évaluer l'attention portée par DeepSeek aux questions de sécurité lors du développement de son chatbot, (...) je pense que prendre des mesures proactives n'est pas trop excessif», a-t-il dit. Un jour avant son équivalente sud-coréenne, l'autorité italienne de protection des données personnelles avait lancé son enquête sur DeepSeek, à qui elle a interdit de traiter les données des utilisateurs italiens. Elle a justifié sa décision par les réponses «totalement insuffisantes» apportées par DeepSeek à ses questions sur l'utilisation des données personnelles.
Un partenariat avec Kakao
Jeudi, Canberra a à sont tour décidé de retirer de «tous les équipements fixes et mobiles du gouvernement australien» les programmes de DeepSeek, face à un «risque» sécuritaire jugé «inacceptable». La Chine a dénoncé cette décision, soulignant qu'elle s'opposait à la «politisation des questions économiques, commerciales et technologiques».
Des géants technologiques sud-coréens comme Samsung Electronics ou son rival SK Hynix sont des fournisseurs majeurs des microprocesseurs avancés utilisés pour les serveurs d'IA. Le gouvernement a annoncé mercredi un investissement supplémentaire de 34'000 milliards de wons (presque 22,6 milliards d'euros) dans les semi-conducteurs et les industries de haute technologie.
Mardi, le patron d'OpenAI Sam Altman a conclu un partenariat avec le mastodonte sud-coréen d'internet Kakao lors d'un déplacement à Séoul. Kakao, qui propose une application de réservation de taxi, une messagerie ou encore une banque en ligne, va pouvoir désormais recourir au robot conversationnel américain ChatGPT d'OpenAI pour proposer de nouveaux services.