«Je veux une Russie libre»
Des soldats russes se battent contre Poutine et son armée

Au lieu de combattre pour Vladimir Poutine, certains soldats russes ont décidé de s'opposer à leur président et à l'armée de leur pays. Deux dissidents racontent pourquoi ils partent à la guerre contre leurs compatriotes et pour défendre l'Ukraine.
Publié: 09.08.2022 à 21:31 heures
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Des soldats russes combattent désormais Vladimir Poutine: c'est la «Légion de la liberté de la Russie».
Photo: Freedom of Russia Legion
Sven Ziegler

Lorsqu’il a attaqué l’Ukraine en février, Vladimir Poutine pensait avoir lancé une guerre éclair. Or le conflit dure désormais depuis plus de cinq mois. L’armée russe, usée, tente encore de s’emparer du Donbass. De nombreux camarades sont tombés, le matériel se fait rare et le moral s’effrite. Un cocktail empoisonné pour l’esprit d’équipe.

Certains soldats russes refusent désormais de se battre tandis que d’autres changent carrément de camp. Si l’on en croit le média d’information russe indépendant «The Moscow Times», une centaine de soldats auraient rejoint la «Légion de la liberté de la Russie». Celle-ci se compose de transfuges ainsi que d’autres combattants biélorusses et russes.

Arni fait partie de ces dissidents russes. Il ne veut pas donner son vrai nom et préfère rester incognito. Son âge n’est pas non plus authentique. «Je me suis retrouvé dans cette guerre d’une manière ou d’une autre. Je me suis dit que soit je mourrais en occupant et en tuant, soit je mourrais avec une bonne conscience. J’ai donc changé de camp», explique le militaire au «Moscow Times».

«Se débarrasser du régime dictatorial de Poutine»

La «Légion de la liberté de la Russie» existe depuis mars. Elle est l’une des nombreuses unités formées par l’armée ukrainienne dans le cadre de la guerre. Dans une sorte de manifeste, l’unité a stipulé qu’elle voulait «se battre pour une nouvelle Russie et se débarrasser du régime dictatorial du président Poutine».

Les effectifs de la «Légion de la liberté de la Russie» sont difficiles à estimer. La milice ne veut pas révéler le nombre exact de soldats qui la composent. D’après des experts, l’unité devrait compter «quelques centaines à un peu plus de 1000 soldats».

Arni ne donne pas non plus de chiffres précis, mais précise que, chaque jour, environ 300 personnes déposeraient une demande pour pouvoir combattre dans la légion: «Cela ne signifie pas pour autant qu’autant de personnes nous rejoignent chaque jour. Nous devons examiner ces demandes. En outre, les services secrets russes nous visent avec de fausses demandes.» Les déclarations du soldat n’ont pas pu être vérifiées de manière indépendante.

«Je veux me battre contre Poutine»

Un autre soldat, dont le nom de code militaire est Professor, se bat lui aussi contre les troupes de Vladimir Poutine. Selon ses propres déclarations, il est originaire d'«une région au centre de la Russie» et a décidé relativement tôt de partir en guerre. «J’ai eu honte et je ne pouvais pas rester les bras croisés», se justifie-t-il dans les colonnes du «Moscow Times».

«J’ai pris ce risque parce que je veux me battre contre Poutine. Je veux une Russie libre», poursuit le jeune homme de 25 ans.

Pour des raisons de sécurité, les vrais noms des soldats ne sont pas révélés lors de l’entretien, tout comme les antécédents des combattants. L’armée ukrainienne n’a pas non plus publié où l’unité avait été déployée. Le groupe est certes actif sur les réseaux sociaux, mais aucun détail n’est donné sur ses interventions.

Les Russes n’y croient pas

En raison du peu d’informations disponibles, des doutes persistent sur l’effectif réel de l’unité et sur le nombre de soldats russes réellement engagés contre Vladimir Poutine. Le reporter de guerre ukrainien Illia Ponomarenko a assuré au «Moscow Times» qu’il y avait certainement «quelques combattants russes». Mais on ne sait pas exactement comment la troupe est organisée et structurée.

Dans les médias d’État russes, l’existence de la légion est même totalement mise en doute. Elle serait «fausse et mise en scène par les services secrets ukrainiens». Pourtant, certains de ces mêmes médias rapportent que des soldats russes ont été arrêtés pour avoir rejoint la «légion ennemie».

Même s’ils se battent pour une nouvelle Russie et donc, de leur point de vue, pour une bonne cause, prendre les armes contre son propre peuple est malgré tout difficile. «Je sens déjà une certaine résistance en moi lorsque je dois me battre contre mes compatriotes, soupire Professor. Mais j’ai des principes, que je défends. Je veux un pays libre et démocratique, et je me bats pour cela.»

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