«Je lui ai dit: 'Tout va bien se passer, tu vas vivre'»
Avec compassion, un soldat ukrainien raconte l'arrestation des combattants nord-coréens

En janvier, Kiev a capturé pour la première fois deux combattants nord-coréens. De nouveaux rapports révèlent que cette mission, particulièrement difficile, a éveillé une compassion inattendue chez les soldats ukrainiens.
Publié: 06.02.2025 à 21:12 heures
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En janvier, les Ukrainiens ont arrêté deux Nord-Coréens.
Photo: Ukrainisches Militär
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Janine Enderli

Ils se sont battus loin de chez eux, puis ont été faits prisonniers en Ukraine. Le 11 janvier, l'armée ukrainienne a capturé deux Nord-Coréens lors de deux opérations distinctes, dans la région russe de Koursk. Pour rappel, les soldats nord-coréens, déployés pour soutenir les forces russes sur le front, ont révélé au service national du renseignement sud-coréen (NIS) et à l'agence du renseignement de l'Ukraine (SBU) ne pas être au courant de cette opération en pensant suivre une formation sur le territoire ukrainien. 

Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a souligné qu'il était particulièrement difficile de capturer des soldats nord-coréens vivants, car les forces russes et nord-coréennes préfèrent les tuer plutôt que de les laisser devenir des prisonniers de guerre. On estime que le régime de Pyongyang a déployé environ 12'000 soldats en Russie.

L'agence de presse AP a recueilli un témoignage poignant d'un soldat ukrainien anonyme, qui raconte les circonstances particulières de la capture d'un des soldats nord-coréens. Aux récits du soldat se mêlent procédure militaire et compassion pour les hommes de Pyongyang: «Nous avons vu les charges énormes qu'ils portaient. Un soldat aussi petit qu'un enfant, avec un lourd sac à dos et une mitraillette. Pourtant, il sprinte. Ils sont incroyablement résistants», explique le combattant ukrainien. 

«Ils sont venus sur nos terres»

En s'approchant des soldats nord-coréens, l'armée de Volodymyr Zelensky s'est d'abord retrouvée sous le feu ennemi. Si deux Nord-Coréens y ont trouvé la mort, le troisième soldat, blessé aux jambes, s'est finalement rendu. «Ils ont probablement été abandonnés», suppose le soldat ukrainien, qui a tenté de communiquer avec le prisonnier en russe, puis en anglais.

Le jeune homme a déclaré être âgé de 21 ans et avoir déjà servi quatre ans dans l'armée. «Leur service militaire obligatoire commence apparemment à 16 ans et dure huit ans», rapporte le soldat ukrainien, concernant le service nord-coréen. Il affirme n'avoir ressenti aucune rancœur envers le combattant ennemi. «Je l'ai regardé et, franchement, j'ai eu pitié de lui. Mais ils sont venus sur nos terres...», témoigne le militaire. Une scène particulière a marqué le soldat ukrainien: «Il a demandé de l'eau, nous lui en avons donné. Puis, il a demandé une cigarette – il en a eu une», insiste-t-il. Selon le rapport, le combattant nord-coréen aurait aussi appelé les Ukrainiens «frères».

«Tout va bien se passer»

Si pendant le rapatriement, le groupement a essuyé des tirs russes, il a réussi à faire monter le Nord-Coréen blessé dans un véhicule d'évacuation ukrainien. Ce n'est que lorsqu'il a remarqué les brassards bleus des Ukrainiens que le Nord-Coréen a compris entre quelles mains il était tombé: «Il avait l'air effrayé quand je l'ai confié aux ambulanciers», se souvient le soldat ukrainien. «Je lui ai dit: 'Tout va bien se passer, tu vas vivre'».

Le même jour, une autre unité est parvenue à capturer un autre soldat nord-coréen, un pur hasard, comme il s’avérera plus tard. Maksym Didorchuk, un parachutiste de 27 ans, a décrit à l’agence AP un combat d’une intensité rare: «Leurs attaques étaient massives, mais ils sont traités comme de simples pions sacrifiables», explique-t-il. Selon lui, les Nord-Coréens sont redoutables parce qu’ils s’en remettent uniquement aux ordres reçus: «Ils obéissent sans discuter et ne battent jamais en retraite», précise l'Ukrainien.

Vers midi, un drone de reconnaissance a fini par repérer un soldat qui avançait en direction d’une position ukrainienne. Maksym Didorchuk ainsi qu'un camarade se sont approchés de lui et ont tenté d’entrer en contact. Ce n’est qu’à cet instant qu’ils ont compris qu’il s’agissait d’un Nord-Coréen. 

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