L'homme soupçonné d'être responsable de la disparition de Maddie McCann peut envisager une prochaine remise en liberté: un coup de théâtre judiciaire a abouti mardi à son acquittement dans une affaire distincte où il était jugé pour des infractions sexuelles.
Une peine de quinze ans de prison avait été requise par le ministère public dans ce procès en cours depuis février où Christian Brückner comparaissait pour deux agressions sexuelles et trois viols commis entre 2000 et 2017 au Portugal. Ces affaires sont distinctes du dossier Maddie, disparue en 2007 dans le même pays.
L'acquittement prononcé mardi par le tribunal de Brunswick (nord de l'Allemagne) ouvre la voie à une possible remise en liberté de cet Allemand de 47 ans dans le courant de l'année prochaine, lorsqu'il aura fini de purger la peine pour viol qui lui vaut d'être incarcéré depuis plusieurs années en Allemagne.
Le parquet a annoncé qu'il allait faire appel. «Nous considérons que le jugement est erroné», a déclaré le procureur général Christian Wolters à l'AFP.
Pas d'ADN
Au fil de presque quarante audiences, les juges du tribunal de Brunswick avaient semblé douter que les preuves suffisent à condamner une nouvelle fois cet homme au lourd passé judiciaire.
Ils n'avaient pas paru convaincus par les déclarations de plusieurs connaissances de Brückner ou témoins sur lesquels repose une large part de l'accusation. Les traces d'ADN font défaut dans les différents cas jugés. La présidente du tribunal, Uta Engemann, a déclaré mardi que l'accusé ne pouvait «être condamné pour les faits qui lui sont reprochés».
Il s'agit d'un revers pour le parquet de Brunswick, qui espérait qu'une nouvelle condamnation et une nouvelle peine de prison lui donnerait plus de temps pour ses investigations dans l'affaire Maddie McCann.
La justice allemande avait fait sensation en 2020 en disant être convaincue de l'implication de Christian Brückner, alors détenu en Allemagne, dans la disparition de la fillette britannique, une énigme criminelle, au retentissement mondial où les fausses pistes et les rebondissements ont été nombreux. Il n'a à ce stade pas été inculpé dans ce dossier.
En 2007, Maddie a disparu à l'âge de trois ans de l'appartement de location où elle passait des vacances pendant que ses parents dînaient à proximité. Sa disparition a donné lieu à une campagne internationale et une mobilisation médiatique hors du commun. De nombreux médias britanniques ont assisté aux audiences devant le tribunal du nord de l'Allemagne.
Violeur masqué
À l'époque des faits, l'accusé vivait sur la côte portugaise de l'Algarve, à proximité du lieu de villégiature des McCann, et un téléphone portable à son nom a borné près de leur logement pendant une demi-heure le soir de la disparition.
Dans leur réquisitoire, les procureurs ont qualifié Brückner, délinquant sexuel récidiviste, de «dangereux sadique psychopathe». Un expert psychiatre a estimé qu'il appartenait à «l'élite de la dangerosité».
Les enquêteurs allemands affirment avoir des «preuves concrètes» de la mort de Madeleine. La défense dénonce au contraire un acharnement judiciaire.
Regard pénétrant, souvent en veste et chemise, l'accusé aux cheveux châtains ne s'est pas exprimé durant son procès.
Deux plaignantes l'avaient identifié après que sa photo a fait le tour du monde en 2020 en lien avec l'affaire McCann. Parmi elles, une femme qui a été agressée sexuellement alors qu'elle avait 10 ans sur une plage de l'Algarve en avril 2007, quelques semaines seulement avant la disparition de Madeleine McCann. Dans un autre cas, il était accusé de s'être exhibé devant une enfant portugaise de 11 ans sur une aire de jeux.
Il était aussi jugé pour le viol d'une septuagénaire, attachée et battue dans son appartement de vacances, d'une enfant d'environ 14 ans attachée à un poteau dans sa maison et d'une Irlandaise de 20 ans chez laquelle il est accusé d'être entré en passant par le balcon. Cette dernière avait livré devant le tribunal un témoignage glaçant décrivant un viol accompagné de violences et filmé. L'auteur était masqué.
Christian Brückner purge actuellement en Allemagne une peine de prison de sept ans pour le viol en 2005 d'une Américaine âgée à l'époque de 72 ans, à Praia da Luz, la localité où a disparu Madeleine McCann.