Hambourg, nid d'espions?
Berlin ferme un centre «islamiste» lié au Hezbollah et s'attire les foudres de Téhéran

La tension est montée mercredi entre Téhéran et Berlin: après l'interdiction de l'emblématique Centre islamique de Hambourg, accusé d'être une officine du pouvoir iranien et de soutenir le mouvement libanais Hezbollah, l'Iran a convoqué l'ambassadeur allemand.
Publié: 24.07.2024 à 19:13 heures
La fermeture d'un centre islamique par Berlin a provoqué la colère de Téhéran. L'Iran a convoqué l'ambassadeur allemand.
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ATS Agence télégraphique suisse

Une vaste opération de police a visé à l'aube l'emblématique Centre islamique de Hambourg et ses organisations affiliées dans toute l'Allemagne, après des mois d'une enquête qui a établi leur pilotage politique par l'Iran, en infraction avec la Constitution allemande.

La Constitution autorise la liberté d'association à condition que l'activité associative respecte la loi et ne soit pas dirigée contre l'ordre constitutionnel ou l'idée d'entente entre les peuples. Ces dernières années, les appels s'étaient multipliés pour leur fermeture.

Téhéran a vivement réagi en convoquant l'ambassadeur d'Allemagne en Iran pour dénoncer une «action hostile» et «contraire aux principes fondamentaux des droits de l'homme» de Berlin. L'ambassadeur d'Iran en Allemagne est quant à lui venu au ministère des Affaires étrangères pour un «entretien», selon des sources gouvernementales, mais il n'a pas été convoqué officiellement.

À Hambourg, métropole du nord de l'Allemagne, des forces de police ont barré l'entrée de l'importante mosquée chiite Imam Ali, connue sous le nom de «Mosquée bleue» et propriété du «Centre islamique de Hambourg» (IZH). Le ministère allemand de l'Intérieur accuse la structure «d'extrémisme islamiste» et de poursuivre «des objectifs anti-constitutionnels». Des perquisitions ont été menées mercredi matin dans «53» propriétés lui appartenant en Allemagne.

Le «plus important nid d'espions du régime iranien en Allemagne»

Ce centre diffuse une idéologie extrémiste «dirigée contre la dignité humaine, contre les droits des femmes, contre une justice indépendante et contre notre Etat démocratique», a justifié la ministre allemande de l'Intérieur Nancy Faeser.

En outre, il soutient, avec ses organisations satellites, «les terroristes du Hezbollah et propage un antisémitisme agressif», a-t-elle reproché. Active dans toute l'Allemagne, la structure agit en «tant que représentant direct du 'Guide de la Révolution' iranien», affirme Berlin.

Au printemps, le coprésident des Verts allemands, Omid Nouripour, d'origine iranienne, avait qualifié l'IZH «de plus important nid d'espions du régime iranien en Allemagne», l'accusant de surveiller les opposants en exil. Fondé par des immigrés iraniens en 1953, le Centre islamique de Hambourg était déjà dans le collimateur des services de renseignement allemand depuis plusieurs années.

Il possède des représentations à Berlin, Munich, Francfort notamment. Après l'attaque contre Israël du mouvement islamiste Hamas, dont le Hezbollah pro-iranien est un allié, le 7 octobre 2023, les députés du Bundestag avaient renouvelé leurs appels à fermer l'IZH.

Les soupçons des autorités allemandes se seraient «confirmés»

De vastes perquisitions avaient été menées en novembre 2023. Le matériel saisi a permis de «confirmer les soupçons» des autorités allemandes, selon la ministre de l'Intérieur. «Nous n'agissons pas contre une religion», a assuré Mme Faeser.

«Nous faisons clairement la distinction entre les islamistes, contre lesquels nous agissons avec fermeté, et les nombreux musulmans qui font partie de notre pays et vivent leur foi. La pratique pacifique de la foi et de la religion chiites n'est expressément pas concernée par notre interdiction», ajoute-t-elle.

Le centre «veut donner l'impression d'être une institution tolérante et purement religieuse, sans aucun projet ou lien politique. En réalité, l'enquête montre clairement qu'(il) n'agit pas seulement sur le plan religieux», a précisé le ministère de l'Intérieur, dans un communiqué. En tant que «représentant du 'Guide suprême de la révolution' iranien, il applique de manière conséquente et catégorique les directives politiques pour l'exportation de la 'révolution islamique'», selon la même source.

Ses activités «montrent qu'il soutient et encourage la dimension militaire et politique du soi-disant +axe de la résistance+ (alliance politique et militaire entre l'Iran, la Syrie, des milices armées pro-Iran au Moyen-Orient, ndlr), en particulier l'alliance avec le groupe Hezbollah». Le Hezbollah est considéré comme une organisation terroriste par de nombreux pays, dont les Etats-Unis, les Etats membres de l'Union européenne, le Royaume-Uni et une majorité des Etats membres de la Ligue arabe.

En Allemagne, sa branche politique a longtemps été autorisée, avant d'être interdite en 2020. Depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, le Hezbollah échange quotidiennement des tirs transfrontaliers avec Israël, qui font craindre une guerre à plus grande échelle.

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