Un massacre de plus. Encore une fusillade qui ensanglante l’Amérique et nous renvoie, de ce côté-ci de l’Atlantique, l’image d’un pays gangrené par la libre circulation des armes à feu. Ce qui s’est passé mercredi soir dans l’État du Maine, célèbre pour ses plages et ses homards plus que pour sa violence endémique, démontre s’il en était besoin que le pays le plus puissant du monde est tourmenté par de terribles démons. Aussi puissants soient-ils, les États-Unis viennent de nous offrir, à nouveau, le visage de leur redoutable fragilité sociale, y compris là où personne ne s’attendrait à voir débarquer un tueur armé d’un fusil automatique.
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C’est cette Amérique-là dont Joe Biden a la charge. Un pays à la fois indispensable à l’équilibre mondial, et capable de plonger en quelques minutes d’horreur dans une nuit de violence et d’incompréhension. Le monde entier, depuis quelques heures, se retrouve témoin d’images bien éloignées de ce que l’on attend, en théorie, de la «balise du monde», pour reprendre l’expression de Joe Biden lors de sa dernière allocution télévisée, à son retour d’Israël. Comment, dans ces conditions, prêcher la paix et le cessez-le-feu à l’autre bout du monde? Comment donner de l’Amérique l’image d’un pays compassionnel et d’une démocratie modèle?
Un révélateur de l’Amérique
Le massacre survenu dans le Maine est un révélateur, en pleine avant-campagne électorale pour la Maison-Blanche, et au moment où Donald Trump passe de tribunal en tribunal. Il démontre que Joe Biden, moqué pour son âge et ses faiblesses physiques, a la plus difficile responsabilité qui soit. C’est à ce vétéran de la politique américaine, déjà candidat à sa propre succession, que revient la double charge de redonner un horizon économique à son pays fracturé et inquiet et de mettre l’immense arsenal américain au service d’un monde moins sauvage.
L’âme tourmentée d’un pays
Certains diront que la tâche d’un président des États-Unis a toujours été celle-ci depuis que ce pays, à la fin de la seconde guerre mondiale, s’est imposé comme le géant du monde libre. Peut-être. Mais la situation actuelle, face à la résurgence des empires et aux folies sociales engendrées par l’angoisse du réchauffement climatique ou le complotisme roi sur Internet, est d’une complexité bien plus grande que celle vécue par ses prédécesseurs.
Dans le Maine, au cœur d’une nuit déchirée par les rafales du tueur, c’est l’âme de cette Amérique-là qui est venue troubler son vieux commandant en chef, pris dans un dîner en l’honneur du Premier ministre Australien. L’âme tourmentée d’un pays qui nous effraie, mais dont nous avons, du Proche-Orient à l’Ukraine, cruellement besoin.