Un commentaire de Richard Werly
La droite française doit l'admettre: Fillon était coupable

La Cour de cassation a confirmé le jugement prononcé en appel contre François Fillon. L'ex-candidat à la présidence française a bien détourné des fonds publics. Une leçon pour ceux qui, à droite, le considèrent encore comme victime, estime notre journaliste.
Publié: 24.04.2024 à 21:25 heures
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La décision de la Cour de cassation était l'ultime recours judiciaire pour François Fillon.
Photo: AFP
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Richard WerlyJournaliste Blick

François Fillon a bel et bien détourné de l’argent public avant de solliciter la confiance du peuple français. Ces mots sont terribles. Ils sont ceux que le jugement final de la Cour de cassation, mercredi 24 avril, oblige à écrire. L’ancien Premier ministre, candidat à la présidence de la République en 2017 (arrivé en troisième position au premier tour avec 20,01% des voix) n’est donc pas la victime d’un complot ourdi pour porter au pouvoir Emmanuel Macron.

S’il n’avait pas, durant sa carrière politique et alors qu’il dirigeait le gouvernement, tordu le bras aux règles en vigueur pour faire rémunérer son épouse Pénélope comme assistante parlementaire, puis comme employée fictive d’une revue détenue par un ami milliardaire, l'ancien député de la Sarthe serait peut-être aujourd’hui à l’Élysée.

La question de la peine infligée à l’ancien chef du gouvernement par la Cour d’appel (un an de prison ferme) sera reposée lors d’un nouveau procès. Mais le fond de cette affaire surnommée le «Pénélopegate» ne fait désormais plus de doutes. François Fillon n’était pas le gestionnaire modèle des finances publiques qu’il promettait d’être, pour sortir la France du risque de «faillite» sur lequel il avait alerté l’opinion.

La droite française, qui croyait avoir trouvé en lui le parfait candidat pour remettre en ordre la dérive structurelle d’un État trop dépensier, ne sort pas grandie de cet épisode assuré, une fois de plus, de nourrir les populismes de gauche comme de droite, et le refrain anti-élites.

Sarkozy dans l’ombre

Ce jugement de la Cour de cassation ne fait pas disparaître toutes les zones d’ombre qui entourent le naufrage de la candidature Fillon, de sa victoire à la primaire de la droite en novembre 2016, au résultat du premier tour de la présidentielle, le 23 avril 2017. Qui a transmis au Canard enchaîné les documents sur les emplois fictifs d’assistante parlementaire de Pénélope, l’épouse dévouée et discrète? Qui a ensuite, dans une autre affaire, transmis à l’hebdomadaire satirique les informations sur les costumes offerts par un avocat controversé à l’ancien Premier ministre?

L’histoire a montré, depuis, que l’ex-chef du gouvernement français a sans aucun doute été la victime de règlements de compte au sein de son camp politique. Sa propension à se présenter comme un «monsieur propre», et sa prise de distance brutale avec Nicolas Sarkozy dont il fut Premier ministre pendant toute la durée de son quinquennat, lui ont probablement coûté sa fin de carrière politique.

La droite peut s’inquiéter

Et maintenant? La droite traditionnelle peut s’inquiéter. Fillon, par son positionnement libéral, populaire et provincial, crédible en matière économique, incarnait une synthèse que «Les Républicains n’ont, depuis, pas retrouvée. Et l’on voit mal comment le Rassemblement national, porté par des vents favorables à la veille des élections européennes du 9 juin, ne profitera pas à nouveau de cette décision de justice, sur le thème «tous pourris, sauf ceux que vous n’avez pas encore essayés».

Emmanuel Macron, qui s’exprimera ce jeudi 25 avril à la Sorbonne sur l’Europe, s’était en 2017 engouffré avec brio dans l’espace ouvert par la déconfiture Fillon. Sept ans plus tard, les partis de gouvernement, comme on les nomme, se retrouvent encore plus le dos au mur. Tandis que la France, que Fillon jugeait «en faillite» dès 2007, a presque, depuis lors, doublé le volume de sa dette publique.

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