C’est parti pour une journée saucisses-bière et barbecue ce dimanche 27 août à Tourcoing (Nord) le bastion électoral de Gérald Darmanin. Celui que Nicolas Sarkozy vient d’adouber comme son poulain pour 2027 dans son livre de mémoires «Le temps des combats» (Ed. Fayard) a, ces jours-ci, le pied sur l’accélérateur politique. Pas question, pour l’actuel ministre français de l’Intérieur, de laisser passer sa chance alors que les dossiers de la sécurité et de l’immigration dominent plus que jamais le débat national.
Les règlements de compte mortels se poursuivent depuis plusieurs jours à Nîmes (Gard) sur fond de trafic de drogue. Le projet de loi sur la réforme du droit de l’immigration et de l’asile sera le grand chantier de la rentrée. A chaque fois, Darmanin, 40 ans, sera aux commandes. Pas étonnant qu’une dizaine de ministres, et même la première ministre Élisabeth Borne, aient répondu à son invitation dominicale. Sur ordre, dit-on, de l’Élysée.
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Gérald Darmanin a trois problèmes: Emmanuel Macron, la droite libérale, et Nicolas Sarkozy. Macron? Parce que le président de la République n’a aucun intérêt à se voir retrouver éclipsé par un ministre qui ne manquera pas de le défier et de le faire passer pour un «has been» afin de s’imposer dans la future course présidentielle, en 2027. La droite libérale? Parce qu’elle a déjà deux champions dans les startings-blocks: l’ancien premier ministre (2017-2020) Edouard Philippe et le ministre des finances Bruno Le Maire, qui fut au début de la présidence Macron le supérieur hiérarchique de Darmanin, alors en charge du budget. Sarkozy? Parce que l’ancien président français est le spécialiste des «baisers de la mort». Plus il se rapproche de vous, plus le mauvais parfum des affaires politico-financières dans lesquelles il est impliqué flotte autour de vous. Attention, danger…
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Une seule façon s’offre donc à ce politicien roué, charismatique et brutal lorsqu’il le faut, de se frayer un chemin sur le devant de la scène, pour crédibiliser une possible candidature présidentielle: créer l’urgence pour provoquer le ralliement, et construire le rassemblement de son camp. Et c’est à cela que doit servir son vrai-faux meeting de rentrée à Tourcoing.
L’urgence? Empêcher l’élection soi-disant programmée de Marine Le Pen en 2027, une hypothèse que Darmanin vient de juger «assez probable» dans La Voix du Nord. Le rassemblement? Darmanin doit maintenant prouver qu’il est à la fois le candidat de la France populaire du barbecue, et celui des notables voire des dirigeants économiques qu’il côtoie dans sa région du Nord, de tradition industrielle. Saucisses et châteaux. Grillades et salon de thé. Avec pour tremplin, dans une France toujours passionnée d’égalité, son pedigree familial: fils d’un cafetier de Valenciennes et d’une employée modeste d’origine algérienne.
Il prend tous les risques
Gérald Darmanin sait qu’en partant si tôt dans la future campagne présidentielle de 2027, il prend tous les risques. A commencer par celui d’inciter ses adversaires à miner le terrain, et à le faire chuter. Mais il a dans cette aventure un avantage: sa connaissance intime, réelle, de l’électorat populaire tenté par les thèses nationales-populistes de Marine Le Pen et du Rassemblement national.
Moins de cinquante kilomètres séparent Tourcoing, sa ville, de la circonscription de la candidate RN à Hénin-Beaumont. Darmanin a vu se disloquer, dans son département, le parti communiste et les mouvements ouvriers. Il peut miser sur ses racines, après la décennie du président «hors-sol» Emmanuel Macron.
Entre la France du barbecue et la France des notables, le mariage à droite peut redevenir possible.