Pour son centième jour à la tête du gouvernement, le Premier ministre français Gabriel Attal a appelé jeudi à un «vrai sursaut d'autorité». Il vise en particulier «l'addiction à la violence» d'une partie de la jeunesse. Pour ce «discours sur l'autorité au coeur de la République», M. Attal avait choisi Viry-Châtillon, dans la banlieue sud de Paris, une ville marquée par la mort d'un adolescent de 15 ans, passé à tabac près de son collège. Dans cette affaire qui a suscité, avec d'autres, une vive émotion en France, quatre jeunes hommes, trois mineurs et un majeur, ont été mis en examen pour assassinat. Ils ont tous été placés en détention provisoire.
Gabriel Attal a sonné la «mobilisation générale de la nation pour renouer avec ses adolescents» et «juguler la violence», se donnant huit semaines pour faire aboutir un «travail collectif» sur ce sujet. «Il y a deux fois plus d'adolescents impliqués pour coups et blessures, quatre fois plus pour trafic de drogue, et sept fois plus dans les vols avec armes que dans la population générale», a énuméré le Premier ministre.
«Tu casses, tu répares...»
Parmi les dispositions annoncées, davantage de temps passé au collège, des élèves perturbateurs qui seront «sanctionnés» dans l'obtention de leurs diplômes, ou encore l'élaboration de mesures pour réguler la dépendance aux écrans. Un peu plus de trois mois après sa nomination, l'ancien ministre de l'Éducation entend s'inscrire dans le droit fil de sa déclaration de politique générale.
Il était alors revenu sur les émeutes urbaines qui avaient embrasé le pays au début de l'été 2023 après la mort d'un jeune homme, tué par un policier en région parisienne lors d'un contrôle routier. Alors que «les violences de juillet dernier ont profondément marqué notre pays», avec parmi les émeutiers «des jeunes, très jeunes parfois, qui semblaient avoir déjà coupé les ponts avec notre société», «nous devons faire respecter l'autorité partout: dans les classes, dans les familles, dans les rues», expliquait-il le 30 janvier devant l'Assemblée nationale. Avant de lancer son mot d'ordre «tu casses, tu répares, tu salis, tu nettoies, tu défies l'autorité, on t'apprend à la respecter».
En Conseil des ministres mercredi, Emmanuel Macron a demandé à son gouvernement de se lancer dans une grande concertation pour trouver des solutions au «surgissement de l'ultraviolence», en particulier parmi les plus jeunes. Charge au Premier ministre de lancer cette concertation, avec les groupes parlementaires et différents acteurs, avec l'objectif d'aboutir à un projet de loi avant l'été. Comme il l'a expliqué lors de son récent déplacement au Canada, Gabriel Attal devrait rappeler sa méthode: faire preuve de «lucidité» et même «reconnaître» ce qui a fonctionné ou pas depuis 2017 puis «prendre des décisions» potentiellement «difficiles et radicales» et «surtout les mettre en oeuvre».
Les multiples épreuves de Gabriel Attal
Appelé à succéder à Élisabeth Borne le 9 janvier, le plus jeune chef de gouvernement de la Ve République, âgé de 35 ans, a déjà connu plusieurs épreuves, à commencer par la crise des agriculteurs, pas encore totalement résolue en dépit de concessions inédites du gouvernement qui ont suscité en retour la colère des organisations écologistes. La dégradation de la situation budgétaire, avec une première salve de dix milliards d'euros d'économies et un exercice à renouveler avant l'été, promet également de tendre le débat politique, y compris au sein de la majorité. Quant à la droite, elle menace le gouvernement d'une motion de censure sur ce dossier.
Gabriel Attal entend néanmoins poursuivre ses projets de réforme, tout à sa priorité accordée au «travail» et aux «classes moyennes», en projetant notamment de durcir à nouveau les conditions d'indemnisation du chômage. Dans ce contexte, et à moins de deux mois des élections européennes du 9 juin, la liste du camp présidentiel conduite par Valérie Hayer continue d'être distancée dans les sondages par l'extrême droite conduite Jordan Bardella du Rassemblement national (RN). Elle voit même son avance se réduire fortement avec la liste PS-Place Publique conduite par Raphaël Glucksmann.
(ATS)