La Suisse saluée, enviée, félicitée par tout ce que la France a d’acteurs et de réalisateur de premier plan! Le drapeau à croix blanche à côté des drapeaux français et européens, sur le fronton de la mairie d’Angoulême. Des acteurs et actrices, des réalisateurs et réalisatrices helvétiques à l’honneur.
Bienvenue au Festival du film Francophone qui s’achève ce dimanche dans la préfecture de la Charente. Angoulême, depuis seize ans, ne rime plus seulement avec bande dessinée. La ville est aussi, chaque fin août, le lieu de rendez-vous du gotha du cinéma francophone. Et cette année, c’est sur la Suisse que ses projecteurs ont été braqués.
Trois acteurs, trois regards suisses
Trois acteurs, chacun dans leur registre, symbolisaient durant cette édition 2023 la symbiose cinématographique entre la Suisse et la France. Le premier fut un géant. Il s’agit de Michel Simon (1895-1975), dont un formidable documentaire, «L’impossible monsieur Simon» retrace la vie. Quel acteur! Quelle personnalité que ce comédien qui donna la réplique à Louis Jouvet dans «Drôle de drame», en 1937! Tout, chez Michel Simon dit le rapprochement franco-suisse. Jusqu’à son dernier film, «Le vieil homme et l’enfant», premier long métrage d’un certain Claude Berri réalisé en 1967. Le cinéaste et producteur deviendra lui aussi un monument du cinéma français.
Il racontait dans ce film son histoire: celle d’un gamin juif envoyé durant la guerre par ses parents à la campagne et accueilli par un vieux paysan du cru. Michel Simon, qui, durant la guerre, avait sacrément fait preuve de complaisance avec l’occupant allemand, réussit alors à émouvoir la France entière. Lui, le Suisse qui ne cessa jamais de se dire «neutre» !
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Le second est du genre flamboyant. Un Belmondo mâtiné de Delon. Vincent Perez présentait à Angoulême «Une affaire d’honneur» son dernier film comme réalisateur, qui sortira fin 2023. Formidable de justesse. L’histoire, là aussi, dit la France et son histoire. Des hommes. Des duels à l’épée, au sabre, au pistolet. L’honneur érigé en vertu suprême, mais aussi dévoyée parce qu’elle permet aux uns d’asservir les autres.
Le regard helvétique sur la France ne se voit pas. Mais il est pourtant là. Vincent Perez campe un pays corseté par ses traditions, où les règles de la chevalerie finissent par être dévoyées, où les femmes sont humiliées. «Une affaire d’honneur» est un film-miroir qui regarde la France en face. Son succès paraît programmé.
«Simplicité, authenticité, proximité»
Une actrice pour conclure ce triptyque. Anne Richard, égérie de la série télévisée «Boulevard du Palais» a réussi le prodige d’incarner, pendant plus d’une cinquantaine d’épisodes, le personnage d’une juge d’instruction confrontée à son interlocuteur favori, un commissaire de police joué lui aussi par un acteur helvète: Jean-François Balmer.
Anne Richard a participé, à Angoulême, au débat sur la «Suisse et ses secrets» aux côtés de la réalisatrice Ursula Meier, en présence de l’auteur de ces lignes. Expliquer la Suisse, sacrée gageure. «Simplicité, authenticité, proximité». Anne Richard a spontanément ces mots pour dire combien, en Suisse, les rapports peuvent être différents de ce qu’on connaît en France, surtout entre citoyens et politiques. Éloge de la démocratie directe dans la salle d’audience principale du Palais de justice d’Angoulême. Éloge, aussi, d’une certaine lenteur helvétique. Belle leçon de Suissitude!
Voici, peut-être, pourquoi les spectateurs français aiment le cinéma suisse: parce qu’ils dégagent cette humanité ordinaire, ce naturel que le pays secrète plus que les passions et les tourments de l’hexagone. Et si le calme helvétique, et cette capacité à regarder tout le monde avec empathie, était devenu l’arme fatale des cinéastes, scénaristes et acteurs suisses dans une France à la recherche de son temps perdu?
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