C’est fini. Plié. Terminé. Michel Barnier a beau croire encore en ses chances avant l’examen, mercredi 4 décembre, d’une motion de censure qui pourrait lui être fatale, son intervention à la télévision ressemblait, ce soir, à un message pour l’avenir.
Oui, le Premier ministre français, âgé de 73 ans, espère encore être épargné par l’Assemblée nationale, et par la coalition des oppositions. «Une motion de censure, ce n’est pas un vote pour ou contre Barnier», a-t-il assuré, «c’est un vote sur un texte», en l’occurrence le projet de loi de financement de la Sécurité sociale.
L’hypothèse de son maintien à la tête du gouvernement demeure donc envisageable. Mais dans les faits, c’est un message à ses compatriotes que l’ancien négociateur du Brexit a passé devant les caméras. Comme s’il se préparait à la même échéance que Marine Le Pen ou Jean-Luc Mélenchon: l’élection présidentielle de 2027.
Beaucoup à perdre
Michel Barnier a beaucoup à perdre dans les prochaines 24 heures. Si l’une des deux motions de censure déposées par le Rassemblement national et la France insoumise (gauche radicale) recueille mercredi les voix de plus de 289 députés sur 577, son mandat à la tête du gouvernement sera terminé. Fin de partie.
Nommé le 5 septembre par Emmanuel Macron, Barnier le Savoyard sera «out». Il devra présenter sa démission au chef de l'Etat qui pourra le reconduire dans ses fonctions, mais c’est peu probable. «Je suis arrivé [dans ce bureau] il y a trois mois en me disant que je pouvais partir le lendemain matin, parce que c’est une question politique et tellement compliquée» a-t-il asséné.
«Je sais que c’est une situation fragile et éphémère. Les dorures qui sont autour de nous, les voitures officielles, les ors de la République, je m’en fous, ce n’est pas le sujet, ce n’est pas moi qui suis en cause. Ce qui se passe dépasse très largement ma seule condition.»
Difficile, en revanche, de ne pas voir dans l’intervention télévisée de Michel Barnier le début d’une vraie-fausse campagne présidentielle qui ne dit pas son nom. L’homme a déjà tenté le coup en 2022, mais il avait perdu la primaire de la droite face à Valérie Pécresse. Alors, pourquoi ne pas se présenter, en 2027, comme le barrage contre le Rassemblement national de Marine Le Pen et le front uni d’une gauche dominée par Jean-Luc Mélenchon?
Revenir à l'hôtel Matignon, en revanche, ne lui parait pas viable s'il est rejeté. «J’ai envie de servir […] mais qu’est-ce que cela aurait comme sens si je tombe demain, après-demain et qu’on me retrouve là comme si de rien n’était, comme si rien ne s’était passé?»
42% d’opinions favorables
Michel Barnier a pour lui sa popularité. Il peut compter sur 42% d’opinions favorables alors qu’Emmanuel Macron, qui ne pourra pas se représenter en 2027, ne peut plus compter que sur 24% d’opinions positives. 76% des électeurs le considèrent en revanche fini, selon l’Institut Odoxa.
Alors? Un premier ministre incapable d’obtenir le vote de son budget par une majorité de députés peut-il rebondir? «Le projet de budget a fait l’objet de travail pendant des semaines et des semaines a-t-il plaidé. J’ai toujours dit que ce texte était perfectible […]. On a écouté tout le monde et on a donné des avancées, des progrès sur beaucoup de points.»
S’il survit au vote de la motion de censure mercredi 4 décembre, Michel Barnier sortira plus fort. S’il doit démissionner, il se retrouvera en embuscade.